Papier de Vialatte sur le Brésil dans « La Montagne ».
Catégorie : 1959
13 janvier 1959
Avec B., au musée pédagogique (cinémathèque) pour voir « Naissance d’une nation » de Griffith. Film retardé : il vient par avion. Très bon (le KKK, la bataille) et parfois ridicule : c’est l’époque, dans ce cas (1914).
Téléphoné à Mille, chez Chanel : je dois faire un papier sur elle.
14 janvier 1959
TSP téléphone : ça marche. Je serai « conseiller technique » de la collection, et les 50 sacs pour Gatti. Déjeuner, rue de Varenne, avec Menant, Gicquel et un chargé de presse de l’énergie atomique : Jégu – très doux et très fin.
19 h : rue Cambon, chez Chanel. Hervé Mille m’en avait parlé en termes enthousiastes (rares chez lui). Rencontré Bresson dans l’antichambre – Dîné avec la grande Mademoiselle et son mannequin M.H. Armand. Le bureau et ses paravents chinois noirs, ses bronzes, ses fauteuils Louis XVI, ses biches près de la cheminée où flambait un bon feu, ses éditions dorées sur tranche (tout Reverdy en manuscrit, et un volume du même, illustré directement par Picasso). Sorti à 23 h. Il neigeait abondamment. Conduit Chanel au Ritz de l’autre côté, puis MHA à son hôtel.
15 janvier 1959
Papier de Bourdier dans Les Lettres sur le « Brésil », très élogieux.
Gatti a vu M.P. Fouchet et a enregistré sur la Sibérie. Le Poisson noir passera peut-être à la T.V. Neige encore.
La grâce des 200 condamnés à mort algériens, la libération de 7 000 internés, la liberté de Messali et l’amélioration du sort de Ben Bella : on sent que la solution approche – peut-être.
16 janvier 1959
« Lettre de Sibérie » : Prix Lumière.
Vu Georges Kessel qui écrit un scénario sur Chanel et doit m’aider. Mais, au Frontenac, il m’explique qu’elle refuse (après, il me propose de collaborer avec lui à des scénarii). Il ne croit pas que M.H. Armand soit la bonne amie de Coco, parce qu’on dit de lui-même qu’il est l’amant de la Grande Mademoiselle. Alors, jugez…
17 janvier 1959
Enterrement du fils des charcutiers de la Villa (22 ans, tué en Algérie). Draperies blanches, drapeau, section de paras, service d’ordre, etc. Mille me téléphone : on déjeunera demain avec Chanel, en espérant que ça ira.
18 janvier 1959
Déjeuner chez Coco Chanel avec Mille. Avant, vu la « Grande Mademoiselle » travailler sur ses mannequins, engueulant les « premières » pétrifiées. Au déjeuner, parlé surtout du scandale Lacaze (ce monsieur, et sa sœur, une Juliette Walter, avaient essayé de faire assassiner par des tueurs payés 13 millions le fils de ladite pour en hériter. A) Ce fils serait simplement un enfant « acheté » clandestinement. B) Lacaze et sa sœur auraient déjà « expédié » l’Américaine Margaret Biddle, (morte après un dîner avec lui) et l’architecte Walter, tué sur la route l’an dernier… etc.
Le soir, dîner avec Coco, Gérard Mille, M.H. Armand et une lady d’origine russe qui a vécu au Mexique. Là encore, on n’a parlé que de Lacaze et de ses morts. Raccompagné la lady à son hôtel.
19 janvier 1959
Au journal, on ne parle que de ça. Aujourd’hui, J.-P. Guillaume, qui devait être exécuté, est photographe à Match !
Vu Mille pour les questions à poser à Chanel. Je téléphone : je la verrai demain.
Par téléphone, un voyou essaie de faire chanter « l’employée » Thérèse : il lui réclame 20 000 qu’elle doit lui apporter – sous peine de… on ne sait pas trop quoi. Et visite de l’abbé, responsable de la JOC de Clichy, à 22 h avec le responsable local pour essayer d’arranger les choses.
20 janvier 1959
Dîner Chanel – avec la petite M.H. Armand qui n’a pas dit un mot.
21 janvier 1959
Lettre de J.J. – a lu le Brésil. Me conseille de me mettre à un roman. J’irai peut-être le voir.
La Salle (« Pitou ») me parle de Coco, de MH Armand, devenue une poupée, une momie creuse, vide, sans idées, sous la pression de la Demoiselle.
Seuil : Bardet, Bastide, peu de progrès. Le financier n’a pas encore parlé. Fayard : TSP me donne à revoir le Blanc pain, et à arranger un de Gaulle (par un Américain). Avec B., dîner chez Michel (enfin) et vu « Le Cri » film italien d’Antonioni.