Et une fois de plus, aux roaring forties !
Soleil, ciel bleu – mais une fatigue qui me quitte de moins en moins volontiers.
Béi et Ariane m’offrent une cravate noire. Pas de symbole: ce sont toujours les seules que je mette.
Un peu de mélancolie.
J’ai travaillé à la nouvelle (les Prétendants). Ca m’a remis d’aplomb. Evidemment, c’est là ma, la vérité.
Catégorie : décembre 1962
3 décembre 1962
Rencontré à l’American Legion le Portugais inconnu – ami de Camus qui veut créer dans sa montagne des maquis « castristes » ! Mais il cherche en vain de l’argent. Pas connu, pas d’argent, pas d’argent, pas connu ; cercle vicieux de tous les révolutionnaires. Propose en attendant de travailler pour Match.
Coup de fil de Kateb : on le verra jeudi. Il a une pièce en répétition au Récamier (la Femme sans tête).
5 décembre 1962
Coup de fil de Danielle. Tout est arrangé avec la Société des auteurs au sujet du Grand Tchou. Elle a vu hier Kateb – désespéré d’être étranger partout. Il boit et se bagarre partout.
La femme d’Alexandre Vialatte enterrée ce matin. Hors Croizard, personne ne le savait. J’envoie un mot.
6 décembre 1962
Soleil. A Londres, le smog a tué 60 personnes. On dit qu’il vient sur la France. Ce qui entretient, dans l’opinion, un agréable angoisse (à défaut d’un autre sujet de préoccupation).
Cdf de J.J. Il vient demain.
Donné papier Jeff.
Dans le Figaro littéraire, papier de Lemarchand anti-Tchou.
Coup de fil embrumé de Sabathier. Il est à Castres. Il a trouvé « mon » Dickens « sublime »…
7 décembre 1962
Kateb devait venir me prendre au journal. Pas là. J’arrive rue Custine : il était reparti en taxi, hagard, à court d’argent, se prenant la tête à deux mains. Revient à 14 h avec deux camarades, dont un ancien maquisard et un employé d’Air Algérie. Ils mangent et boivent et discutent. Cela tourne à la psychanalyse, ou au dialogue dostoïevskien (avec évocation des amours passées, des morts, de la politique). Dramatique par instants, presque fou. Le maquisard – acteur avait tenté de « dormir » avec 17 cachets le matin même… Partis vers 16 h.
8 décembre 1962
Déjeuner quai Blériot chez Auclair. Pour son enquête sur les faits divers, il a vu les gens du P.L. : l’ineffable Desjardins et le sinistre Bellanger – inquiet de le voir et qui parlait « d’éthique » (un mot pareil dans sa bouche !).
9 décembre 1962
J.J. et Gisèle venus dîner à la maison. Elle toujours un peu acide, toujours à la poursuite d’une importance ou d’une ambition.
11 décembre 1962
Déjeuner chez Dubois et Carmen Tessier, avec Croizard – et Boulez, l’hôte d’honneur. Le soir, chez Mme Germain av. Foch avec les Croizard. Vu les Toussaint, Bernier, Mme Boulez mère et le frère, barbu. Programme Stravinsky, Boulez, Berg.
12 décembre 1962
Trop fatigué finalement pour aller au Domaine musical, puis chez Mme Tézenas. Essayé d’emmener Croizard, Otero, Bernard.
Bernard semble se réveiller. Lui ai dit que j’avais vu Bernier hier, un Bernier confiant.
Apporté aux Gatti les jouets – dont une caméra pour Stéphane. Ecrit une lettre pour Danielle à la Société des auteurs. Téléphoné au Seuil pour la sécurité sociale. Nouvelles du film : bonnes.
13 décembre 1962
Mauriac à la T.V. : admirable petit renard au poil blanc.