Sans date.

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Gatti
Ami mais pas cultiveur
D’amitié. Ami sans bêche ni arrosoir.
Aussi, quel choc, quelle douleur
aux gelées de la mort ! Il
pourrait les pleurer sans fin,
ces lilas qu’il n’a pas
arrosés

Ces jours superbes du voyage, ces découvertes, ces heures surmenées, ces mystères iniquités, ses malheurs mais ses fêtes aussi, ces visages exaltés multipliés par la course en avant fournissent des textes compacts et précis qui paraissent dans le P.L. puis dans France-Soir, Libération (1ère formule), l’Express, France-Observateur, Esprit, Paris-Match. Arpentage du connu, recensement des possibles : le ton Gatti apparaît dès qu’on compare sa prose à celle de ses confrères d’alors ; avec lui, le reportage ne veut pas être la description d’un lieu, d’un temps, d’une situation, il ne le peut même pas, il éclate spontanément sur tous les plans de l’espace et du temps ; le Guatemala millésimé 1954 se fait voir comme l’émergence occasionnelle – et vite renfoncé dans sa fosse – d’un univers pluriséculaire, énorme et onirique où voisinent la conquête du XVIe siècle, le colonialisme à l’arquebuse, la croix chrétienne et le gibet des esclaves, le mercantilisme, la terre volée, les dieux, l’art, la folie, la dictature, la police, les armées, l’homme qu’on écrase. Une totalité trépignante. Mais tandis que l’occasion-prétexte redescend au tombeau sous les coups, Gatti, ravalant son chagrin d’homme va, une fois quittée la presse, faire renaître cette totalité dans autant de pièces qu’il en faudra pour répéter autrement le parcours salarié. Il y aura pour le Guatemala : le Quetzal et le Crapaud-Buffle, pour l’Asie : le Poisson Noir, Un homme seul, V. comme Vietnam.
Ce qu’a semé le regard du reporter, un poète va le moissonner.