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1967

Pierre Joffroy était son nom de plume. Maurice Weil celui de l’etat civil.
Né en 1922 À Hayange  en Moselle, il monte à Paris en 1945 après être passé par Lyon où il s’était réfugié en 1941, rejoint plus tard par son frère Gilbert .
Entré au Parisien Libéré dès son arrivée dans la capitale il réalise un de ses premiers reportages en s’embarquant sur un « rafiot « chargé de juifs européens  rescapés des massacres nazis.

Ici commence l’histoire des carnets dont certains disparaissent à l’occasion de ce voyage en terre de Palestine en 1947.
Il s’agit d’un petit agenda (un par trimestre) sur lequel il note rendez-vous, rencontres, conversations téléphoniques, lectures, sorties, projets et ceux de ses amis.
Le format n’autorise pas le développement comme encore moins les épanchements (même si on trouve quelques cris du cœur).
Ces carnets pourraient être (sont) comme une gigantesque table des matières d’un livre à venir, un vaste index qui renvoie à autant de pages qui ne sont pas encore écrites.
Au commencement était le verbe. Reste à trouver la suite.
À vous de lire ce projet de « livre total » .
À vous de nous donner des informations complémentaires que la lecture de Ces 20 premières années (1947-1968) vous inspire.
La suite, 1968-1980, puis 1980-2000, paraîtra dans le courant de l’année 2021.
Les carnets n’avaient jamais été lus, ni déchiffrés avant 2008. Ils ont été photocopiés puis déposés à l’IM.C.(Institut Mémoires de l’ Edition Contemporaine) avec les archives de Pierre Joffroy où ils peuvent être consultés.

3 janvier 1967

Reçu du père Armorin un livre « Souvenirs de FJ Armorin ». Cdf de Verny : Ailleret a obtenu de Pau l’adresse de retraite de Ciaramonti ! Hip Hip Hip !
Mort de Ruby, assassin de l’assassin de Kennedy.

5 janvier 1967

Pour K. Gerstein, vu Cristin à dîner

6 janvier 1967

A.P.teaux, parmi les gratte-ciel en train de percer (la tour Nobel finie), au 46 de la rue Arago. Chiaramonti inconnu aux Etablissements Cadillac. On va chercher cependant.

7 janvier 1967

Fini de lire le Schwarz Bart sur épreuves (« Un plat de porc aux bananes vertes »). Très bon.

8 janvier 1967

Réveillé Monloup, puis Gatti. Parlé du film, ce que je dois faire (intervention auprès de Kessel et de leaders juifs pour amener Tenoudji à distribuer le film. En butte aux assauts de Nastassia Filippovna (chat). Hubert et Dante également fatigués et ravagés : il fait les décors des Chroniques et d’une pièce de Cousin ; l’autre active sa pièce sur le Vietnam.

9 janvier 1967

Téléphoné à Kessel. Il appelle Jo Sinitzky qui se déclare intéressé – connaissant Gatti et même la pièce. Redis le tout à Dante qui va prendre RV. Essayé ensuite de prendre contact avec Samuel. Téléphone impossible.
Gatti, ébranlé par les nouvelles de Chine, abondamment diffusées par la TV et le reste : « guerre civile… Nankin en révolte contre les gardes rouges… ». Les trois quarts faux, rapportés par des journalistes japonais mystérieux et démentis ça et là (lecture de journaux muraux à Pékin).

12 janvier 1967

Peu à peu se dégonfle le canard de la guerre civile en Chine (qui faisait se frotter les mains Américains et Formosans).

13 janvier 1967

Capté radio Pékin sur ondes courtes 40-45 m. Citation d’un article albanais. Chant : « Président Mao, vous êtes le soleil rouge, qui illumine de ses rayons ». Speakerines du monde entier. Clôture par l’Internationale. Puis, radio Moscou 35 m. Clôture par un air de jazz symphonique ! Puis, radio Jérusalem : clôture chant traditionnel yéménite.

16 janvier 1967

Lettre de Druon sur les « Prétendants » – qui sont, dit-il, « au croisement de Jarry, Kafka et autres rêves ».
Avec Sanchez, vu le producteur éventuel de « Manouchian », M. Lépicier, affligé d’un fort tour de reins. Il verra Tenoudji cet après-midi. Moi, j’ai RV avec Samuel demain pour qu’il agisse sur ledit Tenoudji.

17 janvier 1967

11 h 45, 19 rue de Téhéran au FSJW, vu Samuel à qui j’explique le cas Tenoudji. Il accepte d’user de son influence éventuelle. Téléphone devant moi, ne l’obtient pas, me donnera les résultats après l’entretien qu’il aura ce soir peut-être.
Cdf de Sanchez et Dante à qui j’explique ce qui s’est passé. On va accélérer le mouvement. La pièce sur le Vietnam est finie, me dit Dante. Elle s’appellera « V », c’est une inspiration de cette nuit.

18 janvier 1967

Cdf de Samuel : il a vu Tenoudji qui a le manuscrit et va le lire avec sympathie. Pris billets pour Stuttgart et Munich (procès du SS responsable des déportations de Hollande – dont Anne Franck).
Vu et agrafé dans le couloir par J.P. qui me demande encore de faire le Match du monde (comme « Mort d’un président » qui paraît en ce moment dans PM). Il me cite les grands de Match autrefois : Benard, Martin-Chauffier. Puis Mille, très amicalement, me parle de tout et approuve ma position : ne pas accepter à moins d’avoir réellement les moyens d’agir.

19 janvier 1967

Corrida téléphonique pour avoir Mme K.G. qui se dérobe, ne veut pas me voir. K.G. Haus. Décidé d’abandonner Stuttgart pour le moment. Obliqué sur Bonn. Train à 23 h 15, W.L. single.

20 janvier 1967

Bonn où Kelber me rejoint à la gare. Hôtel Stern. De là, chez Kelber : lettre à M. Weisselberg pour lui demander de ménager un entretien avec la veuve Gerstein.

21 janvier 1967

Cdf de Weisselberg : RV en février.

22 janvier 1967

Train de Munich 11 h 17. Le train longe le Rhin : magnifique dimanche sur le Rhin. 5 h 30 Munich avec la pluie. Hôtel Regina. C’est le carnaval de tous les salons, smoks et robes longues. A 9 h, Silianoff qui me met au courant.

23 janvier 1967

Procès à 9 h. 2e étage du palais de Justice. Vu Driand, Dominique Aulères, la TV avec C. (rappelé le procès du Gauleiter Wagner). Les 3 accusés – 2 hommes, 1 femme – sont ce qu’on attendait, 20 ans après. Déjeuner hôtel, Silianoff me rejoint. Ensuite, de 2 h à 4 h, tribunal, déclaration de la Gertrude. Conférence de l’ex- général SS Herster. Ensuite, chez Silianoff.

24 janvier 1967

Tribunal. Suite des explications d’Herster. Protestation des journalistes étrangers. Vu et parlé à l’avocat germano-américain de Francfort, Kemperer (qui était à Nuremberg). Assez déplaisant, très amateur de pub. Content que l’accusé reconnaisse tout de même certaines choses. Content, qu’à Jérusalem, au procès Eichmann, les gens de là-bas ont su ce qu’ils ne savaient pas. Pendant ce temps, le caricaturiste le croquait dans le couloir du Palais. Déjeuner avec Silianoff. Séance à 2 h, puis hôtel et gare. Cinq heures de train à traduire de l’allemand (les journaux). A 9 h, Wiesbaden, hôtel luxueux mais déjà dépassé dès qu’on ouvre le robinet baignoire, un flot d’eau rouillée; grande serviette à la trame un peu usée.

25 janvier 1967

8 h 30, petit tour dans cette grande ville qui ne sait pas bien ce qu’elle est – et de toute façon se sent déchue. Vu l’hôtel où siégea la commission d’armistice, et la rue Weil qui donne sur la Taurus Str. et qui n’est pas gaie.
Avec Kelber arrivé de Bonn et un photographe local, chez le pasteur Niemöller, Brentano Strasse. N. très cordial, très expansif sur K.G. Après, on parle du Vietnam. Il est d’accord pour répondre à 1 interview. Travaillé l’après-midi aux questions à poser à N. Thé chez Blum. En voiture, sous la pluie, à Francfort (37 km). Hôtel Carlton – souvenir de Kelber passé à l’état de ruine. Dîné ensemble restaurant italien. Parlé de Dante.

26 janvier 1967

Le pasteur ne peut pas me recevoir aujourd’hui. Demain matin.
Hôtel réellement infect, sale, ascenseur en panne, sachet savon vide. Déjeuner chez le Chinois avec Pepi et David Wittenberg (qui édite une revue d’étudiants à Francfort).

27 janvier 1967

Petit-déjeuner avec P., de là avec eux, chez le pasteur Muchalski à 10 h. Un homme charmant, mais secret. Me raconte, traduit par David, l’histoire de sa rencontre avec K.G. Le mot « macabre » revient plusieurs fois.
Train pour Paris à 16 h. Vu dans le train Armand (de l’Académie), serré la main. Arrivée 11 h.

28 janvier 1967

Trois cosmonautes américains brûlés à terre dans leur capsule.
Cdf à Sanchez : Tenoudji, malgré toutes les interventions, ne veut pas du film. Reste Sinitzky.

30 janvier 1967

Cdf de Sanchez, puis de Dante : RV avec Sinitsky le 2 ; D. ne peut y aller. J’irai avec Sanchez. Demain, à 9 h 30, il lit sa pièce « V pour Vietnam », juste finie. J’irai. Pour la pièce de Kateb, au petit TNP, il se dit horrifié par la mise en scène de Serreau. Cdf de Garry: retour des USA et inquiet du film sur Hastings dans lequel il joue Harold (Herman). N’a pas eu de nouvelles de F.G. On se verra lundi, me dit-il. Le livre est 100 fois meilleur, dit il maintenant qu’il a pu aller en Amérique.

31 janvier 1967

9 h 30 chez Chesneaux ( ?) rue d’Arras, lecture par Dante de « V pour Vietnam ». 25 à 30 personnes. Monloup, Hélène, Lescot. Le président, Grand Sheriff, multiplié ; personnage ubuesque Bull Dog, écrans multiples. Lancelot,Sanchez, les Monod, représentants du FNL que D. regarde fréquemment en lisant. Allusion à l’enlèvement d’un Vénézuélien pour servir d’échange à un condamné à mort vietkong (Bonheur me l’avait dit à ce moment-là). La vie se met à ressembler à Gatti. Au ciné: « La comtesse de Hong Kong » de Chaplin. Pas un chef d’oeuvre. Un divertissement moyen. Les sarcasmes des critiques, une fois de plus, ridicules, incompréhensibles.

1er février 1967

Funérailles de Juin. 23 ans que Théo est mort.

2 février 1967

A 14 h vu Le Bolzer qui me parle de sa revue de théâtre (Tréteaux 67). Je le mets en contact avec Sylvain – venu me chercher pour aller chez Sinitzky (notre dernier espoir) en l’absence de Dante (à Toulouse). Mais Sinitzky a repoussé le RV à lundi prochain… mauvais présage.

3 février 1967

Vu Avner Len qui a instruit l’affaire Eichmann. Très important pour K.G.
Appris par Kelber la mort de Dibeluis – puis à la TV par Pottecher, celle de Pierre Stibbe (55 ans). Il plaidait en province (procès Meyaoui). Je l’avais appelé au téléphone le 31 janvier pour K.G. (le dossier judiciaire qu’il devait demander pour moi au procureur Robert). Il m’a demandé de lui écrire une lettre à ce sujet. Me signalant qu’il était candidat PSU aux élections à Colombes, il m’avait prié de le signaler éventuellement au journal, si on envoyait quelqu’un là-bas. « Bonne chance ! » ai-je dit. Il a dit : « Merde ! Dites merde ! ». « Oui, ai-je dit. » Il a insisté « Dites merde ! Dites-le ! Dites-le ».

6 février 1967

Mort de Martine Carol (46 ans). Crise cardiaque.
Avec Sanchez, chez Jo Sinitzky (auquel vient se joindre le frère). Il écoute et précise gentiment qu’il ne donnera pas d’argent. Il va lire, et on verra. Sanchez avait le trac. La crise russo-chinoise s’envenime. On ne parle plus que de cela – et du départ des familles russes, protégées à Pékin par les diplomates occidentaux (ambassadeur de France). C’est une histoire d’amour qui finit mal. Mais je suis Chinois. Travaillé vaguement au papier Munich. Pas sur qu’il passe demain.

7 février 1967

Cdf de Mme Desmaisons. Elle me demande conseil. Son mari vient de réussir la 1ère hivernale du pilier de Freney . Exploit indiscutable. La TV n’a dit mot. Il paraît que le préfet de service aurait agi dans ce sens, de concert avec les Frison Roche et autres. Lui conseille de parler aux journaux : Express, Observateur, Monde. Que René D. aille aussi voir M. le préfet et lui dise deux mots.
11 h 30 Grandval, Monnerville, Depreux, le bâtonnier, 3 discours. Robert Bonal, une grande foule, peu de têtes exotiques, un froid vif, en haut de la pente : funérailles de Stibbe, au Père-Lachaise. J’y venais pour la 1ère fois. Une ancienneté imposante. Des tombes célèbres.
Déjeuner avec Hemming chez un chinois – qui aurait besoin des gardes rouges pour redresser sa tendance culinaire. N’a plus revu ni F ni MC. Au cours de son voyage aux EU, a appris qu’il ne fallait pas « voyager » seul mais avec un moniteur. A trouvé un nouvel amour à San Francisco, une écrivaine.

10 février 1967

Chez le pasteur de Billy. Très intéressant : a entendu dire que la mort de K.G. était « louche ». A 7 h, av. Bosquet, Callot du SDECE. Très aimable, a passé trois ans en Israël. Va essayer de me trouver le dossier de K.G. à la Sécurité militaire.

11 février 1967

Expo Picasso au Grand Palais. Une foule énorme : 1 h ½ à piétiner dans le vent froid (mais le ciel restait bleu). Cela valait la peine. Des merveilles vues et savourées. De là, au Petit Palais pour les dessins, céramiques, sculptures.

14 février 1967

Vu l’abbé Lucien Lacour, aumônier des pompiers, et qui fut aussi au Cherche-Midi, très accueillant. Hildebrandt, de l’ambassade d’Allemagne, arrive avec 2 cameramen pour prendre des vues depuis la terrasse pour un film TV consacré aux Théâtres Aubervilliers et St Denis. Soleil

16 février 1967

Journal. Claude Sire et Gall démissionnent. Ils étaient menacés : depuis plusieurs semaines, ils ne travaillaient plus que pour l’UNR (la campagne électorale, le journal gaulliste, etc.).

18 février 1967

Rêvé d’incarcérations, de camps etc… Michaud à 3 h – révision du K.G. Mise au point.

19 février 1967

Oppenheimer mort. Une époque. Pluie. Vent. Lu d’un ancien du « Théodor Herzl », le récit de voyage – au + près des faits (en cahier- sans valeur littéraire- me demande mon avis qu’il faudra donner sans trop de ménagement)

20 février 1967

Cdf de Dante : rentré hier de Toulouse, il va y retourner dans trois jours. Le Grenier montera Vietnam et l’emmènera en tournée. Me demande ce qu’il en est de Sinitzky (je le renvoie à Sachez) et m’invite à Toulouse.

23 février 1967

Cdf de Dante. Part pour Strasbourg avec Sylvain. RV avec Sinitzky demain. Il le fait remettre. Je lui signale un article de F. Soir sur une pièce (« La Guerre entre parenthèses » à Villejuif) qui se termine par : « Tout le monde ne s’appelle pas Armand Gatti ». Il paraît ravi. Je le reprends : « Bravo ! On se sert de toi pour assommer une pièce et tu es content ! » « Gros, tu me fais rougir ! ».
Visite de Claude Berri : m’apporte le papier ; quelques ajouts pour éviter un procès de la part des gens qu’il a pris pour modèles.

24 février 1967

Pris possession de la gloriette. Revu là haut papier sur assassinat Kennedy. Au Vietnam, toujours la merde américaine – le crime.

25 février 1967

Rugby : France-Angleterre, gagné par la France 16-14. Installation dans la gloriette. Monté et descendu plus de 15 fois. Tout terminé à peu prés- excepté les livres.

28 février 1967

Rencontré Labarthe chez les sténos. Grandes embrassades.
A 9 h : à l’Olympia pour le programme Pia Colombo – Alain Barrière. Un public très populaire, et pourtant Pia passait mal. Un public comme D. n’en a pas encore eu et qu’il n’aura peut-être pas (parce qu’il est impossible à avoir : trop à ras de terre au niveau des perceptions, des sensations brutes).

3 mars 1967

Hier fait papier sur Tony-Margaret, en m’amusant. Papier bien accueilli. L’après-midi, Michaud. Il a des ennuis : l’acteur J. Charrier, qui lui avait commandé un scénario, ne l’a pas trouvé à sa mesure. Que faire ? Le modeler à la convenance de J. Charrier, ou refuser ? Je refuserais, lui dis-je. Il le fera probablement. En attendant, essayer du côté de la TV.

6 mars 1967

Les gaullistes gagnent, le PC suit. Défaite de Lecanuet – meilleure chose de la journée (avec le ballottage de Dutourd).
Déjeuner au Shanghai, rue Cujas (le patron me traduit l’adresse de Wang et dit le connaître), avec Chateauneu, Le Bolzer, Jean Schmidt et, plus tard, J.G. Seruzier (qui sera le photographe de « Tréteaux 67 »). Descendu le Boulmilch au soleil, avec Le Bolzer. Je me croyais revenu 20 ans en arrière.

13 mars 1967

Nuit de tempête fracassante. Elections : la Ve république à deux doigts de l’échec. Succès communiste. Cdf de Garry: ne pourra pas sortir son livre avant septembre, à cause de ses « exigences » (de perfection). Me demande des nouvelles de FG. Lui donne le n° de téléphone.

14 mars 1967

Dans France Soir : Boulez renonce au Domaine musical pour se consacrer seulement à la composition.
Téléphone Toulouse : Sarrasin, Gatti (il y restera jusqu’en avril pour monter Vietnam)

15 mars 1967

Téléphoné à Danielle pour proposer à Stéphane de l’emmener à Toulouse jeudi ou vendredi. Décidé vendredi. Le soir, me tombe dessus un papier sur la fille de Staline.

17 mars 1967

Parti pour Toulouse 8 h 40. Stéphane sur le quai m’apprend qu’il peut partir en voiture avec Sylvain ce soir. C’est une économie de 70 F, mais il hésite : je devrai faire le voyage seul. Je le convaincs de partir avec Sylvain.
A 5 h, au théâtre Sorano. Vu Dante avec Hélène discutant des accessoires de Vietnam, pendant qu’on jouait la pièce pour la TV. Revu le soir la pièce dans ses décors et une mise en scène nouvelle. Très belle. Après, chez les Vietnamiens qui s’occupent de « V. comme Vietnam » avec D., H., Claret l’Espagnol, Reine Sanchez et Stéphane arrivés sur ces entre faits.

18 mars 1967

Train 10 h pour Paris. Pensé que je devrais essayer de partir avec D. pour le V.N.
Voyage avec un rugbyman de St-Gaudens qui me conte ses malheurs : son père mourant, une fiancée qui le contraint au mariage (« Je lui ai fait l’enfant d’entrée »).

21 mars 1967

Déjeuner à la brasserie de l’Ile Saint-Louis avec Garry H. Titre projeté du livre : Patchwork. De là, chez les Marchal : lui, invisible, alité, et sans doute aux avant dernières extrémités. Marché, après avoir bu 1 verre, vers l’hôtel de ville. Discuté.
Au Fouquet’s, où Mme Sion, productrice radio, me demande une pièce (3 200 F pour une heure 20). Elle me cite abondamment « ses » auteurs, ce qui a le don de me refroidir plutôt (Jouhandeau, Perret, Déon, etc.).

23 mars 1967

Vacances.

31 mars 1967

Téléphone PM, Thérond me demande quand je rentre ; veut discuter la question du « Match de la Vie », remise par JP sur le tapis. Il veut me faire faire un papier sur le livre de Kessel « Les Cavaliers ».

1er avril 1967

Le « France » à Toulon, c’est le poisson d’avril de la République.

6 avril 1967

Journal. Vu Thérond à midi (« Match de la Vie » parti. Suis-je d’accord ? Oui, mais d’abord Allemagne, Pologne. OK dit-il).

7 avril 1967

Pris le train pour Stuttgart à 9 h 45. W.L.

8 avril 1967

Arrivée 5 h 45. Train à 6 h pour Mössingen. A la gare, Wesselberg m’attend. Il m’emmène fruhstucker à l’hôtel. On parle du sujet. A 10 h 30, chez Mme G. dans sa maison. Elle est charmante, très allemande dans le meilleur sens du terme.
Par la route à Rottwerl où K.G. rédigea sa confession. Vu l’hôtel où il était, l’église qu’il déblaya, l’église qu’il fréquenta, etc. Sur la route, le château des Hohenzollern. Tenté de téléphoner à l’inatteignable Kelber.

9 avril 1967

Beau temps. Petit déjeûner à l’hôtel. De là chez Me G où se trouvait son fils Olaf, une figure très sympathique. Ensuite en voiture à Tubingen. Déjeûner au buffet. Puis congé général. W. et Me G s’en vont faire une visite. Train. A Bonn, au Stern, la même chambre que la dernière fois. Tél. à Kelber : toujours accablé de soucis, dont il est plutôt fier: sa femme malade, un procès contre lui demain etc… Difficile de trouver un restaurant d’hôtel plus sinistre que le Stern- ni une chambre plus misérable dans sa propreté. étriqué.

11 avril 1967

En voiture avec K. vers Cologne. A Schiladgen pour y voir la femme de l’officier fusillé à Remagen, Mme Scheller. RV à 14h après promenade dans la campagne (une vallée verte, boisée). Déjeûner à l’auberge de la Poste. De là, chez Mme? qui est des plus sympathique. Artiste (elle peint), elle a combattu vingt ans pour faire réhabiliter son mari. C’est fait. Le fils est devenu un pacifiste à tous crins. Retour Bonn. Teleph. journal Croizard. Passeport arrivera avec le visa par la poste. Dîné avec K. à l’Arlequin.

12 avril 1967

Train pour Hagen – changement à Cologne. Un vieux paysan poméranien, en vêtements de mauvaise coupe, revenait de son pays après une visite familiale de quelques jours. Il disait que l’Ouest était bien mieux que l’Est, qu’on ne pouvait rien posséder. Il regardait tout comme un enfant dans un magasin de jouets.
W. arrive. En voiture à Berchum, sur les collines du Sauerland. Paysage mi bucolique, mi minier. Fumées et vaches. Il n’y a rien du musée que j’attendais. C’est une institution pour la formation des jeunes protestants. Vu les dossiers : photos et documents. Téléphoné à Thomas Harlan à Dortmund. Sa pièce sera montée le 20 mai. Il se plaint des comédiens. Retour rapide. Vu K qui m’apporte mon passeport. Adenauer malade.

13 avril 1967

Bien dormi. Soleil. Train de Berlin à 9 h 21.A Berlin, Bentz est là avec des nouvelles : le chancelier se mourant, PM me demande de prendre l’avion pour Bonn ! Très ennuyé. Hôtel Kempinski, grand caravansérail de luxe.Tel Kelber puis Croizard Je ne devrais rentrer à Bonn que s’il mourait. Dîné avec Bentz sur le Kurfurstendamm, à la Maison de France. Très cher pour pas grand-chose. Idem pour l’hôtel.

14 avril 1967

Levé 6 h. En taxi chez Bentz. De là, toujours en taxi, Wannsee, la villa de la « Conférence ». Puis, Ste-Anne, la nonciature, l’ambassade de Suède, le mur de Berlin avec montée sur le podium. Déjeuner à la Maison de France puis, pris d’un irrépressible ennui, visité le zoo – oiseaux ! Train . De là en zone E. Frederic puis gare de Berlin Est- le tout long et déprimant.

15 avril 1967

6 h 22 Varsovie sous un ciel bleu. Tout neuf et tout pénible. Hôtel Europeiski. Couru la ville à la recherche d’un billet pour Cracovie (ce soir). Le congrès des anciens déportés embouteille les frêles wagons de l’Orbis.
Hôtel : rencontré Annie Michaud, Anna Prucnal qui connaît toute la famille (Gatti, Monloup). Promenade dans Varsovie: le bois le jardin du Palais écureuil glacier. Train à toute vitesse pour Cracovie 17 h 15. Taxi. Rien au Franzuski. Téléphoné à une adresse donnée par Zamoysky : la comtesse L, une voix de vieille Ségur… Echoué chez le consul de France, père de Patricia de Beauvais

16 avril 1967

Levé lavé. En voiture avec le consul et le vice-consul vers A. Une des plus belles journées possibles en Pologne. Villages endimanchés, et là-bas, la cohue, la kermesse. Rien vu- excepté des gens: prof Weitz, Marcel Paul, Agnan, PP Riquet, le général russe libérateur- des confrères: Mad Franck FS, P H (pour 5 colonnes à la une). Retour. Trouvé chambre au Cracovia. Cartes postales et perdu du temps à ne pas organiser le voyage d’Auschwitz (pour le voir vraiment) et de Belzec.

17 avril 1967

Interminables complications , difficultés et discussions avec cdf partout pour aller en voiture à A. avec un journaliste soviétique. Temps moins beau. A la crémation, les blocs. Tout vu. B. immense babylonien, les crématoires tous sautés, les cendres, la rampe. Retour.
De Cracovie, départ en taxi pour un voyage de 1 000 km à Belzec, Maidanek, Treblinka jusqu’à Varsovie. Départ 19h. arrêt pour l’essence, et puis à 60 à l’heure. Le véhicule, une Volga de 450 000 km, a besoin d’être ménagé. Arrivée à R?. Pas de chambres. Dévié sur Lancut: rien- sauf des chambres chez un particulier. accepté. La dame réveillée, des enfants dans 1 lit, 5 lits d’hôtes dans une grande chambre.

18 avril 1967

Levé à 5 h. Pas lavé. Petit déjeuner à 25 km de là. Pluie. Belzec vers 9 h. Les ossements épars. Maidanek – vers la fin de l’après-midi, Treblinka : grandiose. Un monument qui ressemble aux alignements de Carnac. A 8h30 Varsovie. Pas de chambre à l’Eurospeiski: on a réservé quelque chose dans 1 hôtel en construction: 1 chambre pour le chauffeur et moi. Dîner à l’horrible Eurospeiski avec un orchestre et des danseurs.

19 avril 1967

Bonne nuit . Ciel gris froid. Essayé de changer d’hôtel( impossible faire laver, téléphone au rez de chaussée, etc…) Rien à faire. Vu Kozlowic, d’Interpress, qui m’arrange un RV demain pour K.G. Déjeuner au club de la Presse. A 5 h au monument du ghetto pour la cérémonie anniversaire de la Révolte. Des « délegatsié », des fleurs, des drapeaux. Mortel et bête.
A 7 h avec Prucnal, à la Philharmonie : discours yiddish. Dîner club des acteurs – Vodka.

20 avril 1967

Gris. 9 h , ministère de la Justice, Prof. Pilidowski, spécialiste des crimes de guerre (KG). De là, recherche des moyens de rentrer (train samedi). Déjeuner à l’hôtel avec le directeur des services d’information du ministère des Affaires étrangères et son adjoint. Il a fait ses études à Grenoble. Parlé encore de KG et des camps. Très fatigué à la fin. Sieste. Fatigue encore + prononcée. A 6h chez Clotzko jusqu’à 8h. Parlé de Tréblinka. Cinéma: un film soviétique sur la mère de Lénine, assommant au possible. Dîné au Klub des auteurs.

21 avril 1967

Vu au ministère de la Justice les documents de Nuremberg (que je connaissais d’ailleurs). Déjeuner au club des architectes. 7 h concert à la Philharmonie : Monteverdi et Penderecki. Robe de velours noir. Pendants d’oreilles globulaires. Autographes d’Anna Prucnal. Souper chez A.P. avec sa mère. Disque de Jeanne Moreau (J’ai la mémoire qui flanche). Raconté des histoires diverses.

22 avril 1967

Avec Anna au cimetière juif fermé (sabbath). Gare de Golansk, wagon russe. Mon co-voyageur, français, import export. Samovar et thé. Dîner W.R. polonais.

23 avril 1967

AB dormi. Il pleut sur l’Allemagne, la Belgique. Bu force tchaï. Arrivée 16 h gare Paris. Béi là. Taxi, pluie bagages courrier.

24 avril 1967

Journal. Téléphoné à Danielle : grand succès, dit-elle, de Dante pour « V comme Vietnam ». Les critiques sont formidables. Expo Saby : bonne critique, mais pas de vente (ou peu). Cdf de Le Bolzer : fichu à la porte de PM depuis 8 jours. Croit que c’est parce qu’il a fait sa revue. (Non, pour faire des économies ou placer d’autres.) Un cosmonaute soviétique est mort à l’atterrissage. Grande émotion dans le monde.

25 avril 1967

Encore rêvé de gaz. Croizard : Le Bolzer victime des compressions. PM va mal. Beaucoup moins de pub, mais on ne veut pas diminuer les tarifs. Le bruit se répand que PM est un mauvais support de publicité… la vente est mal faite, etc. Moins d’abonnements que l’Express. Vu « Tréteaux 67 » de Le Bolzer (j’y figure au comité de rédaction). L’ensemble est satisfaisant, avec de grosses faiblesses.
Enterrement d’Adenauer mort vendredi.

26 avril 1967

15 h vu F. Verny chez Grasset avec Mme Koenigsberg, traductrice (pour Eichmann : le texte des interrogations que j’ai proposé).

27 avril 1967

Divers cdf et lettres. Déj rue Custine: les Le Bolzer. Parlé de « tréteaux 67 »: L’ai décidé à se montrer + combattif avec PM. Cdf de la secrétaire de J.P. Il veut me voir. Impossible d’éluder encore cette invitation. J’y vais. Me reçoit seul, puis Gaston, Hervé, Thérond. Le Match de la vie ! Pendant ce temps, il dirige les enchères sur les mémoires de Svetlana Staline.

28 avril 1967

Vu Arthur Comte avec Thérond et surtout J.P. Les enchères montent. F.S.tout seul : 100 000 $. Nous, avec un groupe d’associés, 400 000 $. Intervention prodigieusement lucide de J.P.

2 mai 1967

PM . cdf de Garry Hemming: son livre un peu en retard. et des histoires de photo et de revente( le Dru). Appris que Genev. Antonelli avait été licenciée de Marie Claire. Déjeuner avec Toussaint chez le Chinois rue Marbeuf. Son projet TV : romans-feuilletons à adapter. Parlé de J. Michaud comme réalisateur.
Cdf de Michaud, assez déprimé. Dit qu’il a 30 ans et est décidé à passer de notre côté, Gatti et moi (de notre génération). Ce qui m’amuse beaucoup. Pensé à la tête de Dante. Conférence Arthur Comte (appelez-moi Arthur), puis, avec lui, vu Labarthe pressenti pour le Match de la Vie scientifique. L’ai trouvé très pâle, amaigri, souffreteux.

3 mai 1967

PM. Garry, l’alpiniste Mike Burke et un 3é, tous trés beatniks, pour les affaires (photos etc…). Hertzog accouru. renvoyés à Desmaisons. Convoqué par J.P. à 5 h. Nouveau style de travail, pour moi : l’après-midi ! Avec Arthur, Croizard et Dabernat pêché par là, chez J.P. qui nous lit son papier modèle sur les essais des 24 heures du Mans. Minutes rares. Promet : « Si vous m’aidez, je serai très gentil avec vous ».

4 mai 1967

9 h 30 : ambassade de Pologne. Vu le prof. Ganicki. Parlé longuement de choses et d’autres : Gerstein, les juifs en Pologne, mon métier, le sien. (Esprit brouillon, selon T. Harlan, juif camouflé, selon Zanoyski. Je ne le trouve pas antipathique.)
Au Louis XIV, avec Colette P et Le Bolzer, très à son journal. Vu les maquettes du n°2 . L’ai de nouveau encouragé à lutter contre son licenciement sans formalité. Au L.XIV le patron se rappelait Kurt Gerstein. RV mercredi. Travaillé Match de la vie jusqu’à 10h. Dîné à la pizza de la rue P.Charron avec Menand. Parlé de G.( qui le passionne) et du journal.

5 mai 1967

Match de la vie n° 0 imprimé. 14h chez ? avec Mme Koenigsberg (Eichmann: décidé, il donnera 1 introduction). Thé porte Dauphine. Journal: pied de grue pour voir J.P. qui veut nous entretenir. Mais doit régler l’affaire Svetlana Staline. Arthur, Labarthe et moi dans d’autres bureau de Farran, en face de J.P. devenu celui d’Arthur. Labarthe, malheureux, triste, angoissé: JP le fait attendre pour signer son contrat. Nous l’aidons.

8 mai 1967

Lu « V comme Vietnam » pour une nouvelle collection du Seuil.

12 mai 1967

Déjeuner Toussaint, Michaud et Georgette Elgey. Parlé des projets TV (feuilletons) et de Régis Debray (prisonnier des Boliviens). C’était chez Georges, qui met la clé sous la porte dans un mois. Nous sommes les premiers avertis. Il ne fait plus ses frais. Ensuite, Louis XIV. Les détails de l’histoire K. G. par Germain Descombes, guère plus que l’autre jour. Chaleur d’été, de plein été. Cdf de Dante, de passage. RV lundi soir.

13 mai 1967

La Route, un temps merveilleux – et un soir à s’écœurer de tendresse.

15 mai 1967

8 h 30 Gatti à la maison. Dîné, puis café (et cigarette) dans la gloriette. Parlé de Chris, Cuba, Régis Debray (qu’il a connu à Cuba), surtout de « V comme Vietnam » et les incidents provoqués ici et là par les fascistes, les prises de paroles. Hélène Châtelain, Helmann et Françoise G. qu’il poursuit. Parti vers 1 h 30, après réaffirmation d’une amitié intangible.

16 mai 1967

PM. Vu Arthur Comte qui, peu à peu, se rend compte de ce que c’est, ce monde-ci. Dîné à Versailles chez les Sydney Smith. Appris par Françoise Smith que Thérond n’est pas là cette semaine ( celle du Match de la vie) conclusion facile à tirer.

17 mai 1967

Grève générale contre les pleins pouvoirs. Pas bougé du grenier. le poème, un peu de KG, un peu de lecture

18 mai 1967

Rue Lapérouse pour K.G. (ministre des Affaires étrangères P. Koehler, même cellule que K.G.). De là, à PM pour le Match de la vie. M’occupe de la grève et d’une opération vietcong sur la base de Da-nang. Rien de prêt. Déj à la maison.L’après-midi, refait la grève, revue par A. Comte, dans le sens de sa vision du monde ! Découvert ensuite que la « requête spéciale » à AP et A.P.sur le raid, que je croyais commandée, ne l’a pas été. Vu les photos pour le « ghetto de Varsovie » dont je dois faire le papier. Des tas de photos inédites – terrifiantes. J.P. arrête tout, ne veut pas commencer les Match de la vie, « On n’est pas prêt », prend les textes et s’enferme avec Thérond et Cartier. Comte finit par me téléphoner à 8 h que J.P. a donné le feu vert, quand même.

21 mai 1967

Beau temps clair. Cdf de Dante à 9 h. Revient de Corrèze (la Corrèze tient) et me demande d’être cofondateur de sa Cie de théâtre. Lecture, documentation sur ghetto de Varsovie pour 1 papier.

22 mai 1967

Cdf de Bentz : il a retrouvé des gens qui ont connu G. dans sa maison de B. Envoyé photo KG pour l’aider.
O. Merlin : J’en ai marre. Je me taille au Monde. (Il s’est marié, a un enfant, a besoin de plus d’argent.)
Chez Touraine : il a subi une très importante opération du cœur à Rochester. Très admiratif de l’organisation et des méthodes américaines. Avec Le Bolzer, venu me prendre flanqué de Durckeim (qui nous mène en 2 CV), au théâtre Gérard Philipe à Saint-Denis. Lecture de « La Naissance » par Dante : sur le maquis. Salle de 2 à 300 personnes – avec Michaud, Hildebrandt, Stéphane, les Lancelot, Fr. Godde, etc. Débat. Ensuite, de chez Georges, dîner avec Dante . RV pris avec Le Bolzer pour travail sur la Revue. Moi, très mal à l’aise, pas malheureux, pas souffrant, mais…

23 mai 1967

Cdf de Bentz : les armes « entreposées par Gerstein, c’était du gaz Zyklon ».
Hier, Bruxelles : incendie d’un grand magasin. Des dizaines de morts. 59 rue Courcelles dr Lo.., méd.légiste (KG). Nouvelle piste: M Schmidt présentement à Roscoff. cdf à Bobol. cdf de Dante. J’étais chez Mme Elgey avec Michaud et Toussaint pour la T.V.( projet roman-feuilleton en fonction de vidéo). Crise Moyen Orient.

24 mai 1967

Bruits de guerre insistants au Moyen Orient. Nasser a interdit le golfe d’Akaba à Israël. Déclarations fracassantes. Le mot « guerre » dans tous les journaux. La bourse baisse. Les mères agées s’inquiètent. Chez JP avec Comte, Croizard, Monge, Thérond, Chargelégue, Durieux. Le Match de la vie. A dîner les Silverbauer: parlé de JMSL, Th Harlan et du Mexique (avec photos à l’appui)

25 mai 1967

Pluie . Trombes . Ministère des armées: colonel Bourgue pour K.G. Reçu de Rondière (de la part de M.P. Fouchet) une pétition à faire signer : Régis Debray… Lacaze, Croizard signent. Refus chez les secrétaires de rédaction.

26 mai 1967

Réveillé par Hemming. Il a vu le Gerstein de Friedlander en vitrine. Très surpris. Match de la vie: pas de papier pour moi. J.P. fait tout refaire à 2h du bouclage. Liste Debray en train. Dîné avec Béi chez Henriette en invitant aussi Ségonzac et les Pottecher.

30 mai 1967

Lettre de l’Express : voudrait « renouer » pour une nouvelle publication.
Journal : Diwo parle de Gatti devant la caméra TV (Favallelli).
Moyen Orient : Israël commence à ressembler à la Tchécoslovaquie 1938. Les illusions sur Nasser tombent : pas un homme d’Etat, un bandit politique comme Hitler. Le mot qui dit tout : destruction d’Israël.

31 mai 1967

Lettre de convocation pour la constitution de la Cie A. Gatti, lundi. Les Anglais demandent la liberté de navigation dans le golfe d’Akaba. Les seuls ! Cdf de Caillaud: invité pour demain. Me demande à quelle station de métro descendre… Le métro! Veut voir Gatti aussi.

1er juin 1967

Cdf de Dante : pas de place pour ce soir à « V », mais dimanche. Tout loué. Un intérêt immense pour la pièce. Me demande de lui envoyer Caillaud cet après-midi au TNP. Déjeuner avec Caillaud. Il a vieilli, cheveux tout gris. Fait deux papiers Match de la vie.
Les bruits de guerre se précisent. Excellent papier de Ionesco dans « Combat ». Dans la pièce d’en haut, officiellement nommée: »abri démontable », Béi me dit: « on aurait mieux fait d’installer un abri dans la cave ». A la TV, une émission sur Boulez parlant de sa musique.

2 juin 1967

Cdf de Dante à 4 h (au journal). FS a publié une critique de « V » par Dutourd (c’était la 1ère hier au TEP). « Diffamation », dit-il. D’autres suivent. D’après lui, l’atmosphère côté presse était très mauvaise. D. parle de « mélancolie ». Abattu certainement, mais le combat continue.
Vu Hervé Mille à propos de l’Express. Me déconseille de participer à « l’Expansion » – ce que je n’ai pas l’intention de faire. Parle de la trahison de JJSS. « C’est un Prussien » dit il . Parlant d‘autres juifs, il remarque : F. Giroud est une Turque (bien qu’elle se cache d’être juive par snobisme), Kessel est un Russe d’une tribu convertie au XVIIe siècle ; Alexandre Astruc, un juif du Comtat. Aucune ressemblance entre eux. » Je dis : si ; la morale. Oui, dit-il, la Thora – une tournure d’esprit. Ensuite à l’Express. vu Cl.SS. Mensuel qui paraitra en octobre. Me demande d’y participer (grand papier). Je tâche de placer Caillaud et Antonelli.

3 juin 1967

Dans l’Humanité, article de Leclerc, peu enthousiaste, sur « V ». Michaud à déjeuner. Mise au point du plan TV feuilleton. Belle journée

4 juin 1967

Théâtre de l’Est parisien. « V comme Vietnam ». Donné billets à Legall et sa femme. La salle froide et perdue au début, s’échauffe à la fin et applaudit. Petite discussion du public avec l’auteur. Après, le verre au café voisin, Hélène châtelain, les Michaud, Monloup, J.L. Pays, Chaussat. Rentré 1 h.

5 juin 1967

La guerre. (Radio vers 8 h 30). Cdf sanglotant de la mutter ½ h plus tard. PM : le branle-bas dans les sonnettes des « printings » et le bruit des radios. 13 h : déjeuner avec Steiner (sans Perrault qui devait venir) chez Paul, rue Casimir-Delavigne. Israël seul sujet – avec Gerstein et les difficultés du livre de P. « L’Orchestre rouge » (Melnik, DST, etc.). Steiner, très « révisionniste juif » va partir, soit pour un journal américain, soit pour s’engager. Vu, en face chez Fayard, le service de presse et Toussaint. De là, PM (Smith y va).
Chez Dante avec H. Châtelain, Pays, Monod, Chaussat, Gendron, pour fonder le « Groupe V », (titre « Cie A. Gatti » abandonné ; je n’en étais pas partisan, lui non plus, ni H. Châtelain). Suggéré un titre rappelant une pièce. D’où V, suggestion de Chaussat. Pas un mot d’Israël.

6 juin 1967

Israël : succès militaires annoncés, depuis hier soir. Aujourd’hui, Gaza et Jérusalem ! Jérusalem. Je vois d’ici le visage des juifs du monde entier. Nasser accuse les Américains et les Anglais d’avoir aidé les Israéliens et bloque le canal de Suez.

7 juin 1967

Partis pour Montpellier en voiture sur la nouvelle d’un cessez-le-feu ordonné par le Conseil de sécurité. La déroute égyptienne confirmée.

8 juin 1967

Soleil et vent. Communion de Philippe Woignier. L’Egypte accepte le cessez-le-feu.

9 juin 1967

Dormi à merveille. Départ à Lyon. Tel Robert Tondini. Dîner chez lui avec sa femme et ses 2 filles. Radio et TV : Nasser démissionne. La guerre se poursuit en Syrie : les Israéliens vers Damas. Images remuantes pour moi: les Juifs embrassant le Mur retrouvé, une jeune fille pleurant, des soldats priant. (et tout ce monde juif ému: prières, jeûne, quêtes, placement éventuel d’enfants).

10 juin 1967

Temps gris. Le Nasser a repris sa démission. Arrêt des combats en Syrie.
. A.P.ris, 3h30. Passé prendre courrier journaux PM. Journaux : des Arabes disent qu’ils ont subi la plus grande défaite de leur histoire, plus grave que celle d’Abdel Lashman à Poitiers ou la prise de Bagdad en 1258. L’URSS rompt avec Israël.

11 juin 1967

Froid .Lettre de Thomas Harlan (la pièce n’a pas marché. Semble triste et las. Viendra cet été.) Les indécences de la guerre israélo-arabe : les cris de triomphe des anti-arabes (Tixier-Vignancourt, pieds-noirs, etc.) ; le mépris affiché des « soi disants soldats égyptiens ; le règlement de comptes par personnes interposées.

12 juin 1967

Cdf de Dante. « V » terminé dans l’animosité et la division des acteurs (droite et gauche). Berri songe à financer « Manouchian » avec les bénéfices de « L’Homme et l’enfant ».

13 juin 1967

Vu Arthur Comte. Content de son « Match de la vie ». Déjeuner avec Antonelli, chez Georges.( Parlé du Moyen-Orient). Nedjar apparaît. Cdf pour une émission autour du film « Exodus » sur la naissance d’Israël. Refusé : indiqué J.P. Aymon et Kessel. Mais K. n’est pas là, en Afghanistan. Cdf de Cl. Servan-Schreiber : me propose de la part de JJSS de travailler à l’Express et l’Expansion à part entière. Refusé. Signalé Antonelli pour une place à l’Expansion.

15 juin 1967

Cercle Interallié, Prix F.J. Armorin. Kessel en Afghanistan, Guillain au Japon, Sevry et Secrétain pas là, ni Wolf. Helsey mort. Restaient Genlon, Lemoine, Labarthe et moi. Prix à Guillebault de Sud-Ouest, pour un reportage sur les Portugais (ouvriers illégaux). Voté pour, comme tous. Décidé de donner 2 voix à l’autre concurrent Tomczak des « dernières nouvelles d’Alsace ».Rentré tranquillementà pied avec Labarthe- encore et toujours indigné par les attitudes et bassesses de divers personnages de PM. Pris un verre ensemble.
Envoyé à Dante passeport prolongé.
Fini le Friedländer avec la postface de Poliakoff. Me sera utile. Décidé d’aller en Alsace et en Allemagne début juillet. Révisé absurde papier fille Dayan (journal de guerre).

16 juin 1967

Le printemps- un peu. Papier Match vie d’après Smith. TV.2é chaine : soirée Gatti. Des scènes de « Planète provisoire » et de « V ». Un portrait par Michaud. Eloge du journalisme très fort (pour la 1ère fois). La Corrèze.

20 juin 1967

Chaud, orageux. Croizard me montre un entrefilet du « Monde » d’hier, avec un jugement odieux de Cartier sur Régis Debray. A vérifier. (Faire passer la pétition signée de 50 noms dans le « Monde » ?)
Déjeuner avec Mme Delattre de chez Fayard et Gilles Perrault, auteur de « L’Orchestre rouge ». Très sympathique, simple et sensible.
Dante au Canada.

21 juin 1967

Toute la journée PM : pétition Debray. 122 signatures. Transmis à Niedergang au Monde. (Mille, Bonheur,Contades ont signé). Journée chaude.
Article sur Gatti dans le – à propos de « V ». A la TV, après la projection d’Exodus, confrontation entre Arabes et Israéliens. Extraordinaire. Départ de 2 Israéliens (dont Wiesel). Sophismes nihilistes d’un Egyptien.

22 juin 1967

Jour de joie et de détresse pour tout juif.
Vu Gaston : propose de participer à un livre sur la Palestine (très frappé lui aussi par l’émission d’hier). L’entrefilet paru dans le » Monde ». Réunion syndicale rue F 1er. les délégués annoncent la signature d’1 contrat avec quelques avantages. à 7h30 chez S. Elgey avec Toussaint, Michaud- et …metteur en scène. choix de « M Lecoq » et « l’affaire Lerouge ». Ca avance. De là chez Michaud pour 1 verre.

26 juin 1967

Cdf à Monloup : Gatti rentré il y a une heure. Assez content de son intervention à la réunion sur le théâtre de l’exposition de Montréal. RV demain soir chez Hélène Chatelain.

27 juin 1967

Chez Hélène, av. Leclerc pour la constitution du groupe V. Monloup, Gatti (encore plein du Canada), Manessier, Pays, Chaussat. Gatti va tourner Manouchian de toute façon. On lui propose de monter « Franco ». S’il accepte, il ne pourra en faire la mise en scène. Alors, un autre ? Je suis contre, Monloup aussi. Nom cités Chaussat (qui frétille d’aise puis de déception – le tout sans bouger d’un trait), Monod, Hélène, Lancelot ? Quitté 1 h du matin.

29 juin 1967

Envoyé poèmes à Dante.

30 juin 1967

Départ pour l’Allemagne : autoroute à Sarrebruck.

1er juillet 1967

Kelber. Puis par l’autoroute vers Hagen. à 1h à Berchum par un temps ensoleillé, chaud. Déj.avec Weisselberg dans 1 réfectoire. L’aprème, dans des chaises longues; dans le parc à l’ombre: travail. Plus tard, arrivée d’albert von Bruch, ami de KG. Dîner puis nouvelle conversation sur Harlan avec W dans son bureau. Couchés 10h30 dans 1 chambre à 3 lits de la KG Haus.

4 juillet 1967

Genève, Grasse. Toulon.

25 juillet 1967

Esclandre de de Gaulle au Canada « Vive le Québec libre ! » Réprobation générale. C’est pourtant la politique la plus cohérente qui soit que pratique ce prétendu gâteux.

3 août 1967

Paris. Michaud : Gatti part le 11 pour Hanoï (par Pnom Penh, …) avec H. Châtelain.

7 août 1967

Journal. Effleuré la routine. Reparti. Michaud à déjeuner. Le projet feuilleton TV : songe à Pottecher pour lier les épisodes. Approuvé. Mis en ordre les travaux K.G. et les objectifs prochains.

15 août 1967

Au journal ,par curiosité. Le 4é fermé. Au 3é personne. Trouvé Rapinat. Paris désert quand même, malgré le nouveau prestige d’août. Fini « tête de chagrin ». Travaillé K.G. Cdf de Cl. SS de l’Express : « Etes-vous enfin libre ? » « Non ». « Bientôt ? » Euh…

17 août 1967

Soleil un peu. Quelques papiers pour le Match vie. Vu J.P. Augmenté de 1 000 F et, dans trois mois, une autre . Cdf de Bobol. Quelques renseignements. Conférence JP: Le « Match de la vie » marche à merveille. La vente le dit. Il faut travailler, rester fidèle à la formule « thème » depuis 25 ans… on passe de 9 à 12 pages.  Trois « tomes », dit-il : le monde, les événements, les hommes. A diner, les Smith avec leur fils aîné Michel. Bonne soirée.

19 août 1967

A Freyminge où se trouve M. Wein, pharmacien, ami de K.G. Nous reçoit, très affable quoiqu’un peu malade, dans l’appartement. 1 h. Téléphoné au pasteur Wild, autre ami de K.G. qui n’avait pas répondu à une lettre. S’est montré relativement coopératif. Me recevra au prochain voyage.

21 août 1967

Chargelègue: JP m’a cherché vendredi. Il a tout chambardé dans le Match vie. Cdf de Galante : il m’envoie son « De Gaulle », destiné aux Ricains – afin de connaître mon sentiment.

22 août 1967

mauvaise nuit. angoisse constante. Travaillé KG. Téléphoné Bentz. A la radio (Luxembourg) interview de Régis Debray en prison. Intéressant mais gâché par l’imbécillité du reporter (Chapus).

24 août 1967

Toujours lourd. A déjeuner, Nicolas Obo toujours pétulant et Le Bolzec – qui tout à coup se met à pleurer : sa femme l’a quitté et exige le divorce (parmi les causes : l’échec à PM qui a dû affecter cette femme volontaire et matérialiste).
Conversation avec Comte et Dubois, lequel, avec un grand air d’impartialité, fait de l’antisémitisme sournois (à propos des banquiers juifs qui, réunis à Tel Aviv, ont décidé d’aider Israël).
Visite avec Patricia de Beauvais de l’exposition d’art cinétique au musée d’art moderne. (vasarély, de Soto, une dame Gatti Muller)
A 9 h 30, les cloches en souvenir de la Libération.

25 août 1967

Toute la journée PM. Fait papier sur les déserteurs GI (à cause du VN), l’art cinétique. Passé la soirée et la nuit à boucler le Matchvie avec Chargelègue, tout occupé d’une interview avec Giscard d’estaing.
 : Il était doux, il était fin
Il parle à un ministre
Le voilà tout sinistre,
Sur Chargelègue, Giscard déteint.

4 septembre 1967

Rentrée de Croizard.
Déjeuner avec F. Verny : parlé du Kurt Gerstein qu’elle attend avec impatience.

5 septembre 1967

Pluie
à déjeûner: Le Bolzer et l’oncle Roby.
PM: mort de Lessner (qui venait de publier dans PM un article sur Pompéi). Je ne l’ai pas connu.
Vu à la TV une partie du film Vietnam de Marker, Godard, Resnais, etc. (Caméra III) et le film belge de Delvaux ( l’homme au crane rasé).

13 septembre 1967

cdf AL à moi de faire. Il a fait, dit-il, ce qu’il devait. exprime ses sentiments et son désir.
Tél. Kessel. RV semaine prochaine.
Vu Lancelot qui travaille avec J.M. Serreau sur une pièce pour le TEP.
Un appariteur de PM, jeune blond sympathique, arrêté pour vol de voitures avec une bande. Photos dans le P.L. : Patrick Lapérouse.

20 septembre 1967

Midi : Kessel au Lincoln.
En voiture à Versailles chez Duchatelier, le condamné à mort, marchand de timbres : il était à Fresnes, pas au Cherche Midi ! Pluie sur Versailles qui serait très beau sans le château.

23 septembre 1967

Michaud : parlé projet TV (Monsieur Lecoq). Avec lui, marchand de fleurs. fleurs et anagramme.
Automne

24 septembre 1967

Un jour d’été.
A 6 h chez F. Verny rue de Naples pour y voir l’éditrice américaine, Mme Wolff. Un numéro à faire pour l’intéresser. Il y avait le général Buis , Yves Berge et sa femme, J.C.Fasquelle et un américain, aussi écrivain.
Revu T.V. « La traversée de Paris »

27 septembre 1967

Beau jour
Esther guyot me dit que ….s’en allait. Une meilleure place ailleurs (Constellation, Rencontres) Pensé à Poggiolli pour le remplacer. Téléph. Hésite: il n’y aurait que 1500f, et pas de logement.
Téléphoné à Danielle : ½ heure. De tout : des enfants, de Dante, de Bernard, de Hélène, de Collin, de Helmann.
Procès Régis Debray à Camiri, Bolivie. Une parodie ubuesque.

4 octobre 1967

Au Madison, les Calder. Lui, un peu plus voûté, mais toujours vif et malicieux ; elle, très fine. Parlé du Vietnam, de Debray, etc. Ils auraient voulu aller à Cuba, invités. Le gouvernement américain l’interdit, sous peine de leur prendre leur passeport au retour. Ils ont renoncé. Parlé d’Izis : expliqué pourquoi je me suis brouillé avec lui. M’a donné une affiche « Pour le Vietnam », très belle.

9 octobre 1967

Cdf. de Garry. RV à midi.
Visite de Rinaldi, ami de Poggio, avec un roman sous le bras. Seuil, Grasset ? Seuil.
Envoyé corrections Brésil à Mme Lacouture.
Chez Georges, avec G.H. cueilli sur les marches de l’Odéon. Ensuite résidence Brun, porte de Vanves chez GH: le local que le Seuil lui a loué . Son problème: en finir avec le livre. Lui ai fixé un emploi du temps. Livraison du manuscrit le 2-12.
Dîner à Levallois chez Marie Hélène (encore Camus mais + longtemps) avec les Menant, Borrat, Litran et Christine, l’ancienne secrétaire de …

11 octobre 1967

Cdf de J Davidson. Content.
Lettre de Yves Poggioli: vient vendredi à Paris.
Visite de Le Poitevin. Aiguillé par téléphone sur les Servan-Schreiber (projet de quotidien nouveau).
Travaillé au Davidson.
Au TEP : « Une saison au Congo », de Césaire. (J.M. Serreau) Bonne pièce, bien montée. Lancelot en mercenaire.

12 octobre 1967

Vu Le Bolzer- qui se demande s’il doit exiger de son propriétaire le droit de faire Tréteaux avec des professionnels. Je le lui conseille. Le problème est inévitable: Tréteaux coulera ,à force d’amateurisme (techniciens et rédacteurs)
Tél à Poggio. Il arrive vendredi. A vu Guyot(docu) pas d’accord possible: appointements trop bas ( pour le poste de M..)
Reçu livre de nouvelles de Régis Debray avec une carte « de la part de l’auteur, absent de Paris… ». En effet.

13 octobre 1967

Lettre de Maufrais: change d’adresse.(Maison de retraite de la Résistance)
Lettre de Mantout- intéressante.
Cdf de Chateauneu: Champagne boit, ne travaille plus à Détective, a été demandé par 2 gendarmes. Beyler cherche à virer Chateauneu sans lui payer ses indemnités: on le guette
La comédie de la mort de Guevara continue : son frère venu en Argentine pour le reconnaître, mais le corps a été incinéré, disent les Boliviens.
Lettre de Dante (Pianceretto). Il y parle de mes poèmes.

15 octobre 1967

Pluie
Conversation avec Poggioli. Archives PM : impossible. Son RV. hier pour un journal du Midi: pas trés bon.
Discuté du « problème Juif ». Il ne comprend pas et rejette le sionisme, solution rétrograde – que je reconnais mais…
Il a envie d’écrire son livre, mais se cuirasse de raisons de ne pas le faire. Ai réussi à le convaincre, je crois, d’agir. A fait ,dans l’isba, quelques pages à côté de moi. Est ce parti?

16 octobre 1967

Cdf à Vialatte (pour RV avec Poggio qui veut le voir) et Rognoni (pour les droits des « Prétendants » que je n’ai pas encore touchés).

19 octobre 1967

avec « le vieux gars » Poggio chez Françoise Verny. Grasset. D’abord réticente puis positive. Il doit envoyer quelques pages. Vu ensuite Carine K.-trés en forme. amicale.
Fait deux papiers.
Cdf de Flamant : avant de marcher, demande à voir des textes de Poggio. Lui, ne sait plus quoi faire : dans 5 jours, il doit répondre sur la situation qu’on lui offre à la mairie de Nice (130 000 F, et fini la carte de presse). S’il accepte, il n’aura pas le temps d’écrire. S’il refuse, pas de pain.
Asturias, prix Nobel

20 octobre 1967

Poggio parti pour Nice.
à 11h, vu Delarue qui me mène aux RG chez le C- Lebec (ORCG). Ne sait rien.
Mille: téléphone pour le garçon Lapérouse, enfermé à Fresnes.A l’avocat Dechézelle, offre d’écrire une lettre témoignage.

21 octobre 1967

Déjeuner au Chinois rue Custine avec Davidson, venu « à 22 h chrono » participer à la manif contre la guerre au Vietnam, place de la République. Très content de mon « épissage ».
Orage dans la soirée.

24 octobre 1967

Lettre de J. Davidson, content de la manif et du texte révisé- et de Poggio avec le début du livre (et une inquiétude atrocement masochiste)
Vu Obo rue de l’Ass.
La femme de Thérond, dépression nerveuse.(Victime)

25 octobre 1967

Cdf inquiet de Poggio. A besoin du « couteau dans les reins » pour avancer. Je ne peux rien lui dire. Le texte vient d’être dactylographié, je l’envoie ce matin à F. Verny.

28 octobre 1967

A Sesenheim, mémorial Goethe, puis le Geissert, naturaliste amateur, ancien SS, aujourd’hui petit employé. Il a connu K.G. en parle, encore fasciné. Gêné devant nous d’avoir été SS, lui Alsacien. Explique qu’il est allé défendre sa « patrie ». Vin rouge. Ses enfants pas admis. K.G. lui a certainement sauvé la mise.

3 novembre 1967

Contact avec le général Tabouis (pour K.G.).
Vu J.P. toujours content du « Match de la vie ». Me dit de revenir le voir vendredi prochain pour l’augmentation.
Marie Hélène Camus et le photographe Jarnoux à la maison pour un reportage (Béi peignant des abats jours)

8 novembre 1967

Donné du sang. J’étais le seul rédacteur. Les autres doivent avoir un sang trop noble.

9 novembre 1967

Bouclage avancé.
Vu J.P. qui, d’emblée, m’accorde une augmentation à partir de novembre. « Vous voyez, je ne discute pas. »

10 novembre 1967

Théâtre de la Commune d’Aubervilliers pour « Les visions de Simone Machard » (Brecht). Avec Le Bolzer, une amie canadienne et les Attoun, autres amis. Très bon au début, puis languissant.

12 novembre 1967

Labarthe est mort, dit la TV. 65 ans. Il savait qu’il n’en avait plus pour longtemps. Il me l’avait dit à propos des difficultés qu’il avait eues avec Match-Editions au moment de la signature de son contrat.

14 novembre 1967

Au petit TNP pour « M. Fugue » de L. Atlan. Mise en scène : Monod, décors de Monloup. Ensuite, le verre avec les Lancelot.
Téléph au Seuil: le fils Flamant me dit qu’ils ne prendront pas le livre de Rinaldi, ami de Pozzoli. Lettre suit (avec le manuscrit refusé)

16 novembre 1967

Ste Reine de Chaillot – Funérailles de Labarthe. Infiniment triste.
Visite de Rognoni. Parlé d’Alcatraz (une adaptation radio – ou théâtrale).
Au Petit-Odéon, « Capitaine Bada », de J. Vauthier par la Cie du Cothurne (Maréchal, Luce Mélite…). Vu J.J. et Simone, Le Bolzer, F. de Portefaix.

21 novembre 1967

Lettre de F. Verny : refus très doux du Poggio… « qui n’est pas un écrivain ! »
Cdf à Weisselberg: RV arrangé pour samedi.
Au Récamier, vu « le Roi Faim » d’Andreev (Delvaud – adaptation H. Châtelain).

22 novembre 1967

Cdf de Gatti à 13 h. Revient d’Allemagne quand je le croyais revenu d’Italie. Ses pièces se propagent en Allemagne (V, Franco et Auguste G). Ici, il se retrouve seul avec Monloup – le groupe V ayant fait scission, dit-il (Chaussat, Hélène, etc.). Scission due, explique-t-il, à ce qu’il n’est plus à gauche – et aussi à ce qu’il a confié la mise en scène à Monod (coup dur pour les autres). Retourne en Allemagne dimanche. De sa mère : elle tourne, dit-il, à la vieille dame indigne, elle veut la télé, etc. Il a fait un plan pour la satisfaire, si l’argent arrive comme il l’espère. Le film aussi doit se faire.
Téléph. à F Verny puis sur son conseil, à B. Privat que j’ébranle: n’est plus sur que le Poggio soit mauvais, me demande de le renvoyer. Le dit à Poggio qui me prie d’envoyer un exemplaire aussi au Seuil.

24 novembre 1967

Bouclage. Chateauneu.
Rencontré J.P. dans l’ascenseur : « Ah ! Voilà notre ténor ! »
A 10, à la maison de l’Amérique latine, remise de l’épée à Druon par un ministre et Jeff. Discours. 500 personnes dont, pour la 1ère fois depuis x temps, l’ineffable zozo Bellanger, qui disserte devant les petits fours. Jeff : « Je viens de commencer tes nouvelles. La 1ère est extraordinaire. Franchement, je ne t’en croyais pas capable ».

25 novembre 1967

Départ pour Hambourg 7 h 25 et arrivée 18 h 48, presque à la nuit – dans une ville à peu près vide déjà. Dîner avec Hochstrasser à l’hôtel. Après, en taxi, avec lui, tour de la ville : le building Unilever, qui semble une merveille pour les Hambourgeois, la « tour Michel », le Dom (une grande roue lumineuse) et la Repperbahn à St-Paul : sorte de Pigalle avec plus de néon et le « Eros Center » tout nouveau, le plus grand bordel du monde.

26 novembre 1967

Départ pour Hagen à 8 h 30 par la nuit et le brouillard. Rien vu de Hambourg. Hagen 13 h 07. Weisselberg attend à la gare. Nous conduit à 25 km de là chez le pasteur Rehling, vieux monsieur qui a vu beaucoup de choses et en a retenu beaucoup (l’espionnage de K.G.). Puis, chez Fritz Gerstein, où deux autres frères K. et Johann Daniel sont venus, l’un de Dortmund, l’autre de Bonn (la famille inquiète), petits bourgeois très conscients de leur importance (citations latines, livre de famille).

27 novembre 1967

Stuttgart. L’après-midi vers Welzheim par les bois et la neige.. Vu l’emplacement du KZ. Ensuite, chez Buck,hauptst.SS commandant de Schirneck, l’homme à la jambe de bois, malade. Attendait son médecin. Revenu à 7 h. Louange des prisons françaises. De là, au camp de Welzheim. Pas de lumière, loupé. Train de nuit pur Hagen.

28 novembre 1967

Travail avec W. Visite de l’évêque Wilm, puis au conseil de l’église, Mathias, qui rencontra, enfant, KG.

29 novembre 1967

Visite de la Beethoven Haus, de là, à l’hôpital pour Kelber, allongé, 2 vertèbres touchées après accident avec la Porsche il y a deux jours. Déjeuner chinois de Bonn (faux chinois : germano-indonésien avec crème fouettée sur la salade).

30 novembre 1967

Loué voiture et chauffeur (étudiant) pour Hademar. visite de la clinique d’euthanasie, du frère Alfred S..( « le dominicain de Bourges »). Retour. A 3h, entrevue avec Dichten fils adoptif de KG, ancien Waffen SS. Très long, très intéressant. Dîner à la gare en vitesse. Train de Paris.

1er décembre 1967

Hier, Cartier battu à l’Académie, 6 voix contre 17 au duc de Castries (pas élu non plus). Satisfaction au journal.
Travaillé papier pour Matchvie

2 décembre 1967

45 ans. Anniversaire pas fêté, évoqué discrètement- juste un petit don de Béi: foulard

3 décembre 1967

Dans le Journal du dimanche, article sur le procès d’assises d’un notaire monégasque (Caillaud impliqué et nommé). Procès lundi ou mardi.

4 décembre 1967

Cdf de Caillaud : « Ce soir, je vais me constituer prisonnier ». Procès mercredi. Me demande si je connais Daniel Provence de « Nice Matin ». Non. Voir auprès de Poggioli.
Cdf de Garry Hemming: le Seuil lui a supprimé sa dactylo; Cl. Durand se montre rétif etc…Conseille de patienter, ne pas discuter avec Durand, agent d’exécution, de le faire plutôt avec Flamand.- et si tout casse, de passer dans une autre maison (Gallimard ou ) capable de racheter l’opération.

5 décembre 1967

Téléphone de Gatti : déjeuner samedi.
Téléphone Poggioli pour aider Caillaud. Croie c’est Rinaldi qui fera le cpte rendu. Le préviendra ou ira le voir demain

6 décembre 1967

10h30 RV. Présidence Assemblée avec Widner, dir de cabinet de Chaban Delmas (gouv du Wurtemberg au temps de K.G.. Obligeant.
Théâtre de l’Epée de Bois (Mouffetard) pour « La poudre d’intelligence » de Kateb. Très drôle. A la fin, au saluer, arrivée de K. ivre, qui chante et fait chanter l’Internationale. Surprise de K. en me voyant, joie. M’emmène avec sa troupe d’amis boire dans un restaurant libano-vietnamien (« à la soupe chinoise »). Sa fille, 14 ans, le poète Kheir Eddine, auteur de « Agadir » et qui me récite des poèmes. Bu du vin.

9 décembre 1967

Froid
Gatti à déjeuner rue Custine. Très bonne forme. A Cassel, triomphe de « Franco » malgré les protestations de l’ambassade d’Espagne. Le film pourrait être tourné avec la TV grâce à Biasini (directeur de la TV). Parlé de K.G.
Caillaud condamné à 5 ans avec sursis (les autres ferme).

10 décembre 1967

La Route- le givre à perte de vue.(Mais à Paris, il neige vraiment)
Fin de l’histoire du kidnapping de Versailles : l’enfant a été enlevé et tué par un grand (15 ans).

11 décembre 1967

Chargé par Croizard de faire le papier sur François M…, le gosse assassin.

12 décembre 1967

Pluie
Versailles avec Ménager: l’avenue Douglas Haig et ses villas, la maison de François d’où la sœur, Martine, nous chasse, les voisins débonnaires, la parlotte avec le père du petit kidnappé devant la porte. Cafés confrères. pluie bruine

13 décembre 1967

A Versailles avec ma voiture. Ménager et moi à la police : personne pour nous voir (Commissaire Durr absent). A 11 h chez les Malhiard. Passé 4 h chez eux avec les beaux-frères allemands, les fils, le chien, les amis, etc. Sandwiches, café. Récit des coups de fil du ravisseur et leurs doutes (ils devaient être plusieurs, pense le clan Malhiard). Malhiard était au Wurtemberg de KG en 1945.. Ensuite, chez les flics (trouvé les commissaires Nicomède et Durr qui parlent). Retour au journal

15 décembre 1967

Travaillé toute la nuit et jusqu’à 9h. Téléphoné à 10h
Tout le reste de la journée dans le brouillard.
Croizard croit que mon papier est trop favorable au petit meurtrier. Chargelègue suit. Thérond, non. Plus tard, moi absent, J.P. s’enthousiasme, veut qu’on parle dans un chapeau du « grand écrivain P. J. » à quoi les autres s’opposent amicalement (non sans m’avoir consulté).

20 décembre 1967

A 2h expo science fiction rue de Rivoli Musée des arts déco avec C de Portefaix. Rentré à pied.
Vu au journal J. Michaud et Bellour, venus pour voir dossier photo Freud.
Félicitation du « petit gendre »

24 décembre 1967

Cdf Gatti pour mercredi. RV à 5h.

27 décembre 1967

A 6 h 30, Gatti vient me prendre. Dans la voiture de Sylvain, vers Bruxelles. Café. On y prend un metteur en scène belge, puis Ostende. Casino Ledoux. Hôtel pour quelques films – dîner. Lecture de « La Naissance » dans la salle des colloques. Vu Cayrol, Pepi et David. Après « Nuit et jour » avec tout le monde.

28 décembre 1967

Rentrés à 3h. Réveillé à 9 h. Tandis que Dante a une séance TV, je pars avec Sanchez pour Gves (bac de Bresken). Après un intermède chez un journaliste qui tente depuis deux ans d’écrire un article sur K.G., repris le bac. Casino : départ pour Paris à 4 h 30 (Sanchez ayant dû faire ouvrir par un serrurier sa portière : les clés étant à l’intérieur).

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19ies

1968

Pierre Joffroy était son nom de plume. Maurice Weil celui de l’etat civil.
Né en 1922 À Hayange  en Moselle, il monte à Paris en 1945 après être passé par Lyon où il s’était réfugié en 1941, rejoint plus tard par son frère Gilbert .
Entré au Parisien Libéré dès son arrivée dans la capitale il réalise un de ses premiers reportages en s’embarquant sur un « rafiot « chargé de juifs européens  rescapés des massacres nazis.

Ici commence l’histoire des carnets dont certains disparaissent à l’occasion de ce voyage en terre de Palestine en 1947.
Il s’agit d’un petit agenda (un par trimestre) sur lequel il note rendez-vous, rencontres, conversations téléphoniques, lectures, sorties, projets et ceux de ses amis.
Le format n’autorise pas le développement comme encore moins les épanchements (même si on trouve quelques cris du cœur).
Ces carnets pourraient être (sont) comme une gigantesque table des matières d’un livre à venir, un vaste index qui renvoie à autant de pages qui ne sont pas encore écrites.
Au commencement était le verbe. Reste à trouver la suite.
À vous de lire ce projet de « livre total » .
À vous de nous donner des informations complémentaires que la lecture de Ces 20 premières années (1947-1968) vous inspire.
La suite, 1968-1980, puis 1980-2000, paraîtra dans le courant de l’année 2021.
Les carnets n’avaient jamais été lus, ni déchiffrés avant 2008. Ils ont été photocopiés puis déposés à l’IM.C.(Institut Mémoires de l’ Edition Contemporaine) avec les archives de Pierre Joffroy où ils peuvent être consultés.

2 janvier 1968

Bonne journée de travail. « Le Nègre » (nouvelle), K.G.et bobine magnéto de Chateauneu( livre de franz)

6 janvier 1968

Lettre de Maufrais: d’accord pour passer le « chapelle ».
Conférence hollandaise remise (Gatti).
Hilton

8 janvier 1968

Une carte abandonnée sur le trottoir rue François 1er. Je la retourne, en misant tout sur elle: un 6 de coeur.
avec Béi et Marie Margrite,au cinéma: « Play time » de Tati. Pas un chef d’oeuvre- un bon film un peu longuet.
Cdf de Dante. Il n’ira donc pas à Amsterdam (conférence annulée). Dit qu’il va « casser la barraque » au TEP à cause de l’incapacité du directeur (metteur en scène des « 12 Soleils »).

9 janvier 1968

Neige un peu ,sur les toits.
Cdf de Gatti : me demande d’écrire un article pour le journal du TEP sur sa pièce. Il n’a pas « cassé la baraque ». Pour le moment, il compose.

11 janvier 1968

Téléphoné à Kessel. Refuse portrait par Lazareff – n’aime pas ça.
Cdf de Brincourt: il part ce soir.
Moi aussi , avec Ménager.
Travaillé au Bayle.
Train 11 h 46 pour Chamonix. Ménager puis Brincourt et un stagiaire Krauss.

12 janvier 1968

Hôtel de Paris. Beau temps.
Desmaisons veut partir demain avec 2 compagnons au lieu d’un (Flematti et Bodin). Déjeuner chez Desmaisons. Ménager partira avec eux jusqu’au pied de la paroi du Linceul. Achats divers (passe-montagne, après skis). Dîner à Argentières en tablée : les Desmaisons, nous quatre, plus Bodin le « déserteur », son frère, deux techniciens de Luxembourg. Au retour, avec les Bodin en 2 CV et Ménager, dérapage terrible, chocs sur les murs et retournement. Panne. Deux heures de poussée et d’attente. Voiture abandonnée. On vient nous prendre de Chamonix. Couchés tard après passage au bar de l’hôtel.

13 janvier 1968

Personne n’a dormi, excepté moi. Soleil. Loué voiture. Gagné le .. de la Flégère avec Krauss.Ils sont partis ce matin avec Brincourt et Ménager.
Brincourt à la Flégère à midi. Il n’a fait que quelques mètres avec eux. Ménager à la Flégère vers 3h est allé jusqu’à 2 h du Montenvers où les autres passent la nuit (difficulté à descendre la mer de Glace). Liaisons radio.
Rentrés tous à 5 h 30. Cherché le colonel Garnet pour avoir un hélico. Au téléphone finalement: non. Après les Drus, ils s’étaient fait sermonner.
Dîner à l’hôtel de Paris. Jeannine a préparé une fondue.Tout le monde là, y compris Mme Desmaisons et un Grec nommé Georges Papadutis, armateur, propriétaire de remontées et qui semble avoir bien connu Fidel, Che.

14 janvier 1968

Neige. 40 cm à midi, et ça continue. La Flégère. Mme D. adjure son mari de rester, sinon c’est fichu pour la radio. Embourbé, laissé la voiture. Décidé de redescendre à Paris. Chemin de fer pour Le Fayet bloqué. Car pour le Fayet.
En bas, le plein redoux. gadoue. Train. W.L.

16 janvier 1968

Ménager et Brincourt en avion (Ziegler pilote) sur le glacier.
Avec O Merlin, chez Georges Izard fbg St Germain pour parler de PM (la succession future et nos droits à défendre en cas de braderie au capital)
Cdf. Portefaix, Lazareff.

17 janvier 1968

PM: Vu Le Bolzer venu chercher 1 dossier.ça va mieux. Engagé par José Giovanni pour son film. Espère autre chose de + consistant d’ici quelques jours.
Desmaisons et Flematti sont montés. Je repars demain soir pour Chamonix.
Cdf de Hemming. Le tiens au courant de la tentative Desmaisons. Flamand semble mieux comprendre ce qu’il veut faire.
Le soir avec Béi et Jacqueline, cinéma « week-end » (Godard)

18 janvier 1968

La cordée toujours en panne.
Vu alain Prévost qui emmène à J. Lacouture (Seuil) le manuscrit Davidson avec de grands doutes.
Visite à Gesthoffer, place Vendôme. Très accueillant, m’aiguille sur les  » Archives Nationales » (KG)
Départ pour Chamonix remis à demain ( tous absents ou malades)
Dans Planète n° 38, un extrait de l’oratorio se Sabathier – et une introduction de Pauwels.

19 janvier 1968

2 papiers.
Départ à 9h WL pour Chamonix . Desmaisons et Flematti n’ont pas progressé.

20 janvier 1968

beau temps à l’arrivée.
Ménager. Brincourt toujours au refuge de Leschaux. Desmaison et Flematti vont poursuivre l’ascension.
à la Flégère avec Krauer et sa femme, Mme Desmaisons, soleil sur la terrasse.
Rentré 4h.
Dîner Hôtel de Paris avec Luxembourg, la RAI et le coverboy allemand + son frère et d’autres.

21 janvier 1968

Soleil. hélico parti à les Chaux à 9 h parlé à Ménager par radio. T.V.B., mais pas optimiste sur la tentative elle-même.
Descendu à Megève pour récupérer la voiture à l’altiport (en passant par le vétérinaire de St Gervais pour le chien de Mme Krauss)
Altiport Mme Ziegler, femme du pilote. Dégagé la voiture de la neige. Mise en marche. Retour à 2h à Chamonix. Dormi. Ecrit.
Confié photos ramenées par l’hélico à Patrick Legros.
Le soir, dîner à la table d’hôte comme d’habitude

26 janvier 1968

Neige terrible. Flégère – jonction faite. R.D. essaie de faire redescendre les films à toute vitesse. On envoie 4 hommes à la rencontre. Monté à la sortie de la Vallée Blanche, avec Gery, T. Arrivée à 1 h.des 4 hommes avec les films (Mr Joffroy?) T. part aussitôt pour Genève sous la neige. à 4 h, monté dans la neige et sous la neige vers le Montenvers : Desmaisons superbe dans sa cagoule rouge, apparaît avec Flematti. Redescendus : flashes, colonel, commandant, etc. Chez les Desmaisons: on fait le papier. De là, Hôtel de Paris. Ecrit et téléphoné. Hôtel de Paris. Tout le monde en caravane chez Leo de Filipo de l’autre côté du tunnel. Toujours la neige. Ménager éblouissant de gaîté. Retourné à l’Hôtel de Paris avec Desmaison pour les légendes (grève en Italie). Et à minuit, nous apprenons qu’il n’y aura que 4 pages de photos- et pas de …

27 janvier 1968

On se quitte. Décidé de prendre le train ce soir. Gery venu à l’hôtel nous expliquer qu’il y a des doutes, que R. D. n’a peut-être pas touché l’arête à cause du bouclage de PM, etc. Ménager le rapporte en toute innocence à R. D. au « bivouac ». D. arrive fou furieux. Je l’entends hurler de ma chambre. Je descends. Bodin, Ménager, Brincourt, Mme D. essaient de le retenir. Il brandit la table. Je dis à G. « fiche le camp ». Il s’en va, blême. R. D. met du temps à se calmer. Nous aussi.
Train avec Brincourt et Leblond (le Figaro).

30 janvier 1968

Retrouvé à Radio Luxembourg les Desmaisons, les Ménager, Brincourt, Krauss, Marge et Tixier. Déjeuné au Canter puis PM : présentation à Thérond, visionnage des photos du linceul.
Chateauneu: Chargelègue confirme l’engagement à dater du 1er février.
Fait papier « linceul ».

31 janvier 1968

10h rue de la Faisanderie chez CH Levi, avocat. pour K.G.
Offensive générale du Viêt-Cong (FNL) dans les villes. Saigon à feu et à sang. Surprise totale des Américains.

1er février 1968

Chateauneu est officiellement entré à PM.

3 février 1968

Cdf de Dante. La TV d’accord pour coproduire « Manouchian » (les 30 M de l’avance). Il est exclu des répétitions des « 13 Soleils » au TEP. Songe à faire une retraite à La route.

10 février 1968

A 11 h 30, bd de la Bastille. Monloup, Hélène et Dante. Il doit déjeuner avec Lanzmann : pense qu’il va signer pour le film avant 8 jours. Pièces : Cela va mieux avec Réthoré au TEP – mais bien plus mal avec Garran à Aubervilliers (Franco). Attaqué d’autre part par les communistes orthodoxes pour avoir publié et préfacé le journal de guerre d’un maquisard colombien. Parlé de l’offensive Viet-Cong, de Barnard et de mes doutes.

12 février 1968

RV avec l’ex-major Evans (qui connut K.G. à Rottweil et envoya son rapport). Charmant personnage, savant chimiste qui travailla aux fusées.
Lecture de « Mrs Dalloway » (V.Woolf.)

13 février 1968

Pluie
La Tour de Londres. les corbeaux.
De là déj .au « Prospect of whilby » dans l’Est, parmi les docks, les grues.
Ensuite, je passe au bureau prendre la secrétaire Patricia. Interview de l’impresario d’un groupe qui succède aux Beatles, les Bee Gee.
Puis encore au bureau.
Dîner à l’hôtel.
Contact avec Vrba (KG) et les polonais pour retrouver Jan Karski.

14 février 1968

Avec Ariane, au palais de Westminster, une séance à la chambre des Lords (vu lady Asquith sur un banc, à droite, au bout, isolée), une séance à la chambre des Communes (la masse brillante, le speaker, les deux lignes, les « Yeah » de l’opposition, les pieds sur la table centrale, les dormeurs).
Obtenu l’adresse de Karski et Vorba.
Entendu à la radio, tandis que j’écris un papier, un concert donné au Royal Festival Hall avec « le Marteau sans maître », dirigé par Boulez lui-même.

15 février 1968

Téléphoné à Boulez qui décommande un dîner demain soir. Est là jusqu’à mercredi (second concert), puis à La Haye, Concertgebouw, où l’on jouera ses « Eclats » pour la première fois.
Téléph papier. Déjeuner avec Lemoine du côté de Covent Garden.
Sieste pour moi , puis le bureau.
cdf du fils Renevey. Invité à déj. pour demain au Horse shoe.

16 février 1968

Beau temps, froid, clair et sec
Marché tous les trois dans Fleet Street, le Strand. Musée juif visité. De là au Horse Shoe.
Déjeuné avec le major Evans (qui apporte photos et document) et P. Renevey.
à 9h30 à l’hôtel Carlton Towers pour diner avec le Pétrus- sans A et B. Viande et Bordeaux admirables.
Petrus en verve, attendri aussi. Rentré à 1 h.

19 février 1968

Mort de Gaston Bénac (Paris-Soir de mon enfance).

23 février 1968

Thérond me prend à part et me demande mon appui pour que rien ne soit changé au « Match de la vie »- où Monge se pousse.

27 février 1968

Cdf nombreux: Chateauneu, Chargelègue. On m’attend pour la contre-offensive. Monge s’est installé dans le bureau de Conte.
Le roman de Chateauneu accepté par Gallimard. Le voila embêté : il l’a aussi proposé au Seuil. Cdf de Derogy, qui fait un livre sur l’Exodus et me demande si j’ai des documents. Lui indique le père Armorin, Sévry.

28 février 1968

Beau temps
Vu J.P. Lui ai expliqué qu’après le départ d’A. Conte, il ne fallait pas mettre dans son bureau quelqu’un qui ait l’air de lui succéder – mais Croizard. (proposition faite avec Chargelègue, approuvée par Thérond et Mille)

4 mars 1968

Beau temps.
Cdf de Ménager: retour du Vietnam, qui me demande de mes nouvelles.
Cdf aussi de Desmaison qui a appris la chose- et veut nous inviter pour la fin du mois.
Cdf de J.-L. Pays : veut, dans son livre sur Gatti, parler de ma collaboration avec Dante pour 4 films.

8 mars 1968

A la TV, 2e chaîne, une émission de J.-C. Bonnardot où Boulez, interviewé à Londres, parle très bien de Debussy.

13 mars 1968

Pour K.G., visite à M. Dabernat, magistrat à Nuremberg.

16 mars 1968

Tél. Sanchez : la première des « Soleils » hier. Pas tout à fait au point mais Dante pas mécontent. Spectateurs partagés : certains se sont perdus dans la 1ère partie, d’autres dans la seconde. La première de ‘la Cigogne » à Strasbourg le 29? R.V. pour vendredi avec Sanchez.

20 mars 1968

Pluie
Au TEP pour les « Soleils ». Dante pas là ( à Strasbourg). Vu Sanchez, Michaud, Pays, Pia. Dans la pièce, Lancelot, Edith, Annick Michaud. Décors de Monloup. Le courant ne passe pas. Gueule des critiques. Applaudissements mous. La pièce elle-même a des faiblesses, que la mise en scène ne sait pas transcender.

21 mars 1968

Presse déchaînée : JJ Gautier et Dutourd en tête.

22 mars 1968

10 h : partis avec Sanchez dans la R16 pour Eindhoven. Longue interview de Neuwenhuisen (ami de K.G.).

23 mars 1968

L’institut pour la docu de guerre fermé.
Allés à Rotterdam pour J. Mees, ami de Kafka. Pas trouvé. J. Mees très connu banquier, dit on aux pompes à essence. Téléphoné Mme Mees. Mari très las très fatigué, presque aveugle sourd. Mais il arrive au tél. il entend très bien( bien qu’il ait 82 ans) mais ne veut pas recevoir.
Bruxelles, cinémathèque. « L’Homme invisible » (revu après 30 ans encore bon mais moins terrorisant), puis « Cristobal », avec sous-titres à partir de minuit.
4 mariages aperçus en 2 jours.

28 mars 1968

Grosse chaleur.
Dans les cafés du Cherche Midi et rue des Acacias, à la recherche de K.G.
Mort de Gagarine dans un accident d’avion.

29 mars 1968

à déj. Le Bolzer et Desmaison.
Rencontré Mille dans l’ascenseur qui s’exclame que moi seul peut sauver « Parents », si je consens à y faire immédiatement un papier etc…etc…

31 mars 1968

Soleil l’aprèm.
Train pour Bonn.

5 avril 1968

Assassinat de Martin Luther King, à Memphis.
Cdf de Kelber : « Un document extraordinaire », dit-il, trouvé à Nuremberg dans les fondations d’une maison. Issu du RSHA met en cause, comme appointés par les nazis, Hull, Joe Kennedy, Rockefeller (Hull coupable du reste de n’avoir rien fait pour sauver les juifs). « Ca peut changer les élections américaines, dit Kelber. Je ne me sens pas tranquille avec ça, on peut me descendre ! Présente l’histoire à PM, toi qui connais les nazis, etc. ». Il m’envoie la traduction – au journal (au téléphone, je n’ai pas voulu lui donner mon adresse. Tables d’écoutes ?).

6 avril 1968

Téléphone de Gatti : retour de Strasbourg. Ca a bien marché. RV lundi.
Cdf de Sanchez : cherche le scénario de Cottinet que la TV allemande veut commanditer.
Déj avec Gary Hemming, encore have et plutôt sale. Parlé du livre. Thé puis douche, shampooing. Dîner improvisé. Parle de tout: de M.L.King, du Vietnam, du livre encore, de l’amour jusqu’à 10h30. Parti plus confiant qu’à l’arrivée.

8 avril 1968

Cdf. de Gary: pas de co-édition possible, lui a dit Durand. Reste l’Amérique, une souscription aussi.
Cdf de Kelber : il a prévenu Chargelègue de l’existence du document.
Chez Gatti à 4 h. Encore secoué par l’échec de la pièce.

10 avril 1968

Vu Weisenfeld de la radio allemande(KG.) Pas grand chose
L’aprém à Rueil, pour y voir Corty (ORCG) Rien
Entre temps, j’assume l’intérim de Chargelègue au journal.

12 avril 1968

2 visites KG: porte de St Ouen- rue de la Convention.
Journal à 11h30 conférence.
Vu Len à 4h rue Lauriston KG
Rudi Dutschke victime à Berlin d’un attentat. Le 1er depuis les nazis.

13 avril 1968

Travailloté. Lu Traduction du document Kelber. N’intéressera que les E.U. ou l’Allemagne.

15 avril 1968

Travaillé: lettres (KG) (17!)
Ecrit à Dante – pour Pâques (confirmation par Danielle à qui j’ai téléphoné de sa démoralisation).

 

egoflash : ENVOYÉ À GATTI, AVRIL 1968

6 mai 1968

Ciné : « Je t’aime, je t’aime », de Resnais. Pas passionnant.
Grande manifestation étudiante. Emeutes toute la nuit. 10 000 étudiants. On parlait de « groupuscules », de « meneurs » ! Ils échappent à tous les partis – signe des temps.

8 mai 1968

Train pour Avignon. Garofalo viendra par avion demain.

9 mai 1968

Avignon 6 h 12. Attente au buffet. R.V. P.Boulez à 7 h 34. En voiture vers St-Michel, par Forcalquier. Soleil un peu.La Maison. Le lieu de la future maison.
Ma chambre. Lecture. Arrivée à 1 h de Garofalo.Déjeuner.
Photos (sauf à sa table de travail) puis campagne. Vers 6h, à Forcalquier: le cimetière, la ville vieille.
Dîner. Feu de bois. Ses derniers enregistrements : l’Oiseau de feu, Bartok, Mahler, Varèse.
Carte à Dubois.
Coucher 11h

10 mai 1968

Réveillé par le coucou. Allé sur le chemin : le berger .

Parti avec Boulez, Garofalo, plus tard. Je conduis la Wolkswagen, Petrus, la Mercedes. Marignane : attente de son impresario qui arrive de Londres avec 2 autres personnes, dont un M. Fleischmann. Ils retournent dans les voitures à St Michel.
Déjeuner à la gare. Train 14 h 10.
A l’arrivée, impossible de prendre la rive gauche : les flics déviaient la circulation sur le pont Henri-IV. Les étudiants ont construit des barricades au Quartier latin.
Au journal. Eu envie d’aller au quartier voir- puis.

11 mai 1968

Emeutes dans la nuit. Des centaines de blessés, etc…
Allé là-bas vers 10 h. Rues dépavées, voitures incendiées, des flics partout. Petits meetings, cortège des agrégatifs en grève, sit in…
Chez Georges, radieux : il était dans le coup vers 2 h ; D. G. et son fils sont restés jusqu’au bout sur les barricades. Georges et moi, ensuite, sur le boulevard, rue Royer-Collard, Soufflot, Gay-Lussac.
Ariane parle sans cesse des étudiants, m’interroge. A son lycée, ils ont manifesté « en faisant du tapage » en classe.

12 mai 1968

Pompidou, hier soir, a fait un discours, 3 h après son arrivée à Orly (de Kaboul). Le gouvernement recule : libération des étudiants, ouverture de la Sorbonne. etc…
Journée ensoleillée.

13 mai 1968

Rentrés à 4 h de la Route. Grande manifestation étudiants – travailleurs de la République à Denfert. A.P., les snobs y sont allés. Grève générale. On parle peu des négociations américano-vietnamiennes commencées aujourd’hui.

15 mai 1968

Chaleur
Vu chez Georges, Lentin (Nouvel Obs) pour K.G.
Le matin, B Privat de Grasset (sur le paiement des traductions de documents)
A 9 h 30, Sorbonne, les affiches, une discussion dans un amphi, la cour.

16 mai 1968

Les étudiants ont occupé hier soir le théâtre de France. Grèves, occupation d’usines.
Passé 2h aux archives de France dans les rayons et la poussière.
Papier sur les étoiles et les autres mondes.
A la TV, table ronde aux informations de 20 h, entre 3 journalistes (Ferniot, Bossi – Fig. – Charpy) et 3 étudiants Cohn-Bendit, Geismar et Sauvageot. Le plus étincelant : Cohn-Bendit qui écrase.

17 mai 1968

Déjeuner chez Georges. Après, à l’Odéon dans le meeting ininterrompu : salle bourrée, discussions en désordre. Incident avec un voisin derrière moi, obligé de faire taire (un provocateur ou un policier).
Journal. Billancourt : drapeau rouge sur le toit, ouvriers, le cortège des étudiants : les murs ne sont pas tombés. Dîné chez Georges. Odéon. Impossible d’entrer. Sorbonne, grand amphi. La CGT reprend en mains. 3, rue Michelet : les comédiens (Barrault s’expliquant. Vu Delphine Seyrig).

18 mai 1968

De Gaulle revient de Roumanie ce soir – un jour avant. Avec les communistes et la CGT, il va tenter de juguler les « groupuscules ».
Vu Gatti à 2 h chez Monloup. Grande conversation : les barricades, les Cohn-Bendit, les « 22 mars », Stéphane – La Route.

20 mai 1968

Grève quasi générale – sauf gaz et électricité. A la banque : pas plus de 500 F. Essence : des queues de voitures. Les épiceries dévalisées.
Discussions PM. Déjeuner au chinois Marbeuf.
Au journal : D. Cohn-Bendit, retour de Saint-Nazaire.
Rentré en voiture du journal: partis à 6h15, à 7h30 rue de Lisbonne.
Décidé de ne plus être à la CGT.
Cdf à 10 h, me réveillant : Hanoteau. « Alors ? ». M’apprend que Lacaze a tourné sa veste, que Thérond est en baisse depuis la colère de J.P.

21 mai 1968

Toujours l’attente.
Chez Dante à 11 h en voiture (1 h). Dort encore. Remâche la trahison. Pressenti pour aller à Lyon lire des pièces dans les usines. Indécis. Déjeuner avec lui, Monloup, Klee puis Pia et Sanchez. (Pays et Gendron et le PC.)
Journal : le vide et moins de discissions par rapport à hier. On attend le débat sur la motion de censure et le discours de De Gaulle vendredi.
Reçu le fiancé de Françoise Godde.
Envoyé lettre de démission à la CGT.
A 9 h, rues désertes : pas de cinéma, le débat sur la motion de censure à la TV.

22 mai 1968

Débats à l’Assemblée nationale. Au journal, tout le monde devant la TV. Patrice Bodin, venu à Paris pour voir : « On ne sait rien à Chamonix ».
Parti à pied pour le bd Saint-Michel. Chez Georges, où va Monod. De là, à la manif. : drapeaux rouges, « Cohn-Bendit à Paris », « Nous sommes tous des juifs allemands », « Les frontières, on s’en fout »… Retourné chez Georges, puis rattrapé la manif bd Raspail. 7 à 8 000. Un barrage énorme de police. Pas d’incidents. Service d’ordre étudiant. Chez Georges où j’ai dîné avec Dante, Monloup et un gars qui revient de Chine, connaît Wang et m’encourage à lui écrire.
Histoire de Stéphane, convoqué par l’archevêque Marty aujourd’hui, après une conduite révolutionnaire à Stanislas.

23 mai 1968

Journée lente et calme.
Fériée. Pas de voitures.
Le soir, émeutes encore au quartier latin.
Démission d’un chef CGT : il était possible d’avancer vers le socialisme…

24 mai 1968

Circulation aisée. Soleil printemps.
Génèral Milliot rue St Dominique (pour adresse ENTZ). Atmosphère de tension.
Journal.Appris que Dante est blessé chez Hélène châtelain : les bras fracturés par les CRS hier soir. En voiture jusqu’à Denfert. Resté jusqu’à 5 h, puis à la manif avec Hubert et Daniel Ayfou.
Cdf de Marie-Claude : dit qu’on a fondé un « Comité des écrivains du Seuil », dont je fais, paraît-il, partie. Futilité !
Barricades jusqu’à 3 h du matin et courses dans Paris de la rive droite à la rive gauche.
Couché chez Hélène.

25 mai 1968

Pas d’essence. Des amis me ramènent au journal. Vu Hervé qui m’offre un thé et parle politique : trouve que le discours ne valait rien, mais que la peur est reine de France.
Toussaint arrive pour me ramener rue Custine.
Files pour l’essence devant quelques rares postes approvisionnés.

26 mai 1968

La Route. petits travaux
Rentrés en passant par Clichy pour y prendre Mme Viard.
à 8h, cdf de Croizard: ils me proposent de m’inscrire parmi les 11 noms de la société des rédacteurs- futilité.

27 mai 1968

Refus ouvrier de signer les accords du Châtelet. En voiture au journal. Grandes discussions. Réunion à 16 h pour la Société des rédacteurs. Je combats contre tout vote avant information. Thérond y tient pour être sûr, dans l’inattendu, d’être élu (utile contre JP, GB, HM) .
Déjeuner avec Hemming et Monloup chez Georges. De là, chez Hélène, Dante et ses visiteurs. Avec Hemming, Monloup, J.-L. Pays, Gendron, Daniel, Annick Michaud et Edith stade Charléty : grand meeting de l’UNEF, 40 000 personnes au moins. Mendès France applaudi. Vu Flamand devant l’Odéon; discuté avec lui, Hemming là (Le Seuil est en grève, le comité alors? )

28 mai 1968

temps chaud orageux.
Avec Sophie Bastoulle (Figaro) et Béi, conduit Dante à Bichat chez Thibault. De là, journal. Déposé Béi. Guerre pour l’essence (5H du Rond Point à la pompe François 1er)
6 h15 : on m’apprend que J.P. refuse la Société des rédacteurs – sur un ton « gaullien ». J’arrive. Dispersion. Nouvelle réunion rue François 1er. Vote sur la société. Arrivée de J.P. Grand discours.
L’unanimité pour la Sté. La majorité pour le dépôt immédiat des statuts.
Gatti : tout OK.

29 mai 1968

Cohn-Bendit à la Sorbonne ! De Gaulle s’en va à Colombey.
Bruits d’intervention de l’armée.
Entrevue Mendès France– Mitterrand, etc.
Cdf : aller chez Hélène Châtelain chercher du matériel photo. Monloup, Chaussat,et moi à Robinson chez Chaussat. De là, de nouveau chez H. C. où Daniel Anfoux se réveille (il dormait par terre, dans un sac). Klee présent.
Boulez démissionne de la CGT (Le Monde).

30 mai 1968

Cdf Agathe de Saint-Salvy. Elle est à Paris, habite dans l’appartement qu’elle occupait naguère avec H. de Bourbon. Nous invite ce soir. Décliné.
12h Nouveaux bruits de bottes : Massu, garnisons d’Allemagne, etc.
Animation partout, mais pas d’angoisse, seulement de la tension.
16 h 20 : De Gaulle à la radio (pas à la TV). Déclaration de guerre. Dissolution de l’Assemblée, élections en juin ; « comités civiques ». Si ça ne suffit pas, d’autre voies : art. 16 ?
Aussitôt, à PM la division se révèle. Les gaullistes en hibernation parlent. Manif sur les Champs-Élysées : tous les supporters de De Gaulle. Foule énorme. Croizard plane.
Chez Hélène Châtelain, Gatti, Monloup, Daniel, les Charvein. De là, chez Georges, très excité à mesure qu’il approche de son terme de restaurateur, puis le Quartier latin. Des groupes, des discussions, tracts. Rentré 2h du matin

31 mai 1968

Magnifique journée.
Photos de chars dans les journaux. Ils se font voir de la population.
FO ne veut plus de manifestations de rue.
Quelques reprises. Plusieurs pompes sont ouvertes : le verbe magique fait recouler l’essence…
Télé 7 jours: J.Diwo et le Bodo avaient arrêté le vote hier soir après le discours. G.Corti m’en parle.
En fin de journée, ça s’arrange.
Rentré à 7h. Emmené la piote à 9h rue Mouffetard : les comités d’action présentent « La Commune » montage de Gatti, devant St-Médard. Début 10 h. Projections, texte dit par H. Châtelain. Vu les Bassoul avec leur fils de 8 ans, Daniel, Annick Michaud, Monloup, Ghislaine et une amie Catherine Arena ( ?). De là, à la Sorbonne, amphi Richelieu. Incendie dans les combles : de l’eau partout.

1er juin 1968

Cdf de Garry à 8h, très embrumé, je ne me rappelle rien.
A La Route. Les pompes à essence sont pleines. Plus de grève.Mais une rage de conduire… Retour vers 4 h, à Paris chez H. châtelain. Visite de 2 Grecs, amenés par Georges : des résistants qui paraissent peu sérieux (Dicoyannis ?). Avec Daniel et Hubert, rejoint vers 7 h la manif UNEF en train de se disloquer devant la Halle aux Vins. Barrage de police sur le pont. Meeting pour un mouvement révolutionnaire. De là, chez Georges : dîner, dernier soir de Kalymnos. Ecrit sur une nappe en papier une injonction commune à J.J. d’écrire un livre sur la peinture. aperçu Me Koenigseder.

3 juin 1968

Tél. de Dante. Il améliore sa « Commune » qui passera dans les lycées.
Au ciné Racine, « le caméraman » de B. Keaton avec A,B et Sylvie amie d’Ariane .

4 juin 1968

11h30 après 1heure 15 de voiture depuis la Butte, arrivé porte de Vanves. Vu Andréucci Cherche midi: ne se souvient absolument pas de KG, ni du suicide.
De là chez Dante, av. Leclerc. Déj. « La Commune » marche si bien qu’on la lui demande partout (lycées, comités d’action). Il songe à un théâtre dans la rue, carnavalesque, avec des grandes figures qu’on promènerait partout sur les lieux mêmes (barricades, etc.), manif et théâtre mêlés. En plus, cabarets littéraires. D’accord pour penser qu’il faut voter De Gaulle ou s’abstenir – et plutôt s’abstenir.

5 juin 1968

9 h radio : R. Kennedy victime d’un attentat en Californie, à l’issue des « primaires ». Suite de dépêches contradictoires.
16 h : Vous savez ? Thérond, Lacaze et Carone sont mis à pied par J.P.
16h30: Discussion dans les bureaux. Chargelégue: ils sont à pied pour deux mois. J.P. s’installe dans le bureau de Thérond. H. Mille demande sa retraite. Piquet de grève. Chargelègue suggère que nous nous entremettions. J’accepte. Appelé Hanoteau qui arrive. Il est scandalisé par cette atteinte aux droits syndicaux. Suggère de sonder Pompidou qui mettra fin à tout ça. Allés voir Hervé Mille à la résidence George V, nous reçoit en robe de chambre et nous lit sa lettre de démission ; nous conseille d’aller voir J.P. L’assemblée nous charge de la mission, tout en votant le principe de la grève.On nous attendra là. Nous descendons. Réunion rapide dans le bureau de Croizard puis A. de Contades nous introduit en nous prévenant qu’il faut lui « donner quelque chose ». Un homme crucifié J.P. face aux patrons du nord.(suite dans « Mai 1968 ).
17h réunion à la cantine. Projet de grève générale avec occupation des locaux.

6 juin 1968

R. Kennedy est mort.
A 11 h, réunion avec les délégués des « ordres » dans mon bureau. Ulcérés. On redressera la barre, la situation financière du journal étant telle que …
15h Croizard dit que J.P. était radieux dans l’ascenseur.

16 h 30 : J.P. reçoit les délégués des « ordres ».
18 h 30 : Cantine: Thérond expose la situation.
Reprise des métrobus

7 juin 1968

Cdf Garry. Inquiet. RV ce soir.
on boucle. Chargelègue , épuisé, reste chez lui. Match de Paris, pour moi.
Vu Thérond et Lacaze qui me remercient de mon « ambassade ».
Cdf à Poggio à Nice. Très emballé par les événements – et toujours sur le sable.
20 h Etonnant numéro de De Gaulle à la télé : il reprend le jargon de Nanterre, se pose en révolutionnaire, fait de l’humour en passant.
Cdf Garry: on se verra demain

8 juin 1968

au journal, nouveau jour de demi bouclage (le sirlo toujours en grève). Surtout l’aprém, atmosphère extrémement lugubre. Croizard, Martine, Mazerette le ressentent et m’en parlent. C’est dû à la grève, mais aussi à la perspective des économies. Lacaze aurait parlé de 50 têtes.
Le fils de Maquet ramassé à Flins par les CRS, se trouve à Beaujon. On le fait sortir en fin de journée.
Pluie.

10 juin 1968

10 h 10 Cdf à Gatti. Il me cherche justement. Stéphane et Sylvain, disparus. Ils étaient à Flins. Me demande de voir.
Vu Dubois qui téléphone à Amade.
Dans les couloirs: Contades et Cartier, directeurs généraux de PM!
11h15 conférence avec Maquet et Lacaze: confirmation. Projet de « grève des cons »:agitation. (« Mille, ça suffit » avait écrit Lacaze sur le bureau de Hervé…)
Déj: Gary Hemming. Ses manuscrits. Son prochain départ
15 h Stéphane retrouvé : sera relâché dans la soirée. Cdf à Dante.
18 h 19 h : à Beaujon, attente de Stéphane avec Dante, Monloup et Sylvain. Cdf à Hélène : il est là-bas, sorti à 5 h 30.
Journal: lettre de J.P. aux responsables René Cartier, Raymond idem et Contades nommés directeurs généraux. Ordre de faire des fascicules PM sur la révolution, les Kennedy si PM ne sort pas. Monge collabore aussitôt. Hanoteau et moi , en attente. Thérond? pas encore de décision.

11 juin 1968

Nouvelle manif hier soir au quartier après la noyade d’un lycéen à Flins.
Au journal, atmosphère d’attente mêlée de détresse. Vu Gaston Bonheur.
1 mort à Sochaux, tué par balles par les CRS. Grave.
RV à 6 h 45 gare de l’Est avec Monloup et Amphoux. Pas trouvés. Beaucoup de gens à la manif UNEF. Pas de cortège, les gens ratissés aux environs. A et R sous les poussées des flics. Tourné autour de l’église. Chaleur.
Rentré 8h30. Téléph chez Monloup: Ghislaine m’a répondu qu’il était reparti à la contrescarpe.

12 juin 1968

Des bagarres toute la nuit dans divers quartiers. Le gouvernement amorce la répression. Me V: « ils cassent tout »
Conseil des ministres : interdiction des groupes : CLER, 22-Mars, JCR…
Reprise à la Bourse.
Le reflux : hier édito du Monde (Beuve-Méry) contre les manifs, article de F.G., etc.
journal: Chargelégue songe à se mettre au vert. Mauge dans la foulée de Cartier
Réunion 18h bibliothèque.
Chez Dante – Châtelain : Monloup, Amphoux, Georges et Rosette, Boudjema, 2 étudiants de Strasbourg, 2 autres. Dîner improvisé. Parlé des événements. Dante : il y a 1 point de positif dans tout cela. Les mouvements vont devoir se réorganiser, ça va resserrer les liens. La fête gaulliste finira vite avec les échéances, le chômage…
En rentrant avec Georges et Aubert, quartier latin: CRS aux deux extrémités- et des curieux.
21 h Menant m’appelle :  » L’heure de la vérité », dit-il, es tu prêt à réclamer tes indemnités – si on vire 35 types, etc. » Réponse réservée. Il me parle du mariage de Hervé et de Coco Chanel !

13 juin 1968

Cdf 8h30 Chargelègue. Dit que Lacaze et Maquet sont dans la charrette. Va intervenir auprès de JP.
Cdf de garry Hemming: RV pour les manuscrits.
Cdf à Hanoteau : il arrive. Vu Hanoteau : ne nous emballons pas.
Déj. Rapinat, Chateauneu, Marie
17 h 15 avec Hanoteau et G.B. chez Dubois : cela se calme ; il n’y aura pas de liste (ce que Chargelègue avait déjà obtenu à 15 h en allant voir JP).
« Je suis en butte à la haine du pingouin », aurait dit Thérond hier.
18 h 10 cantine : annonce des mesures. Que faire ? Charge parle de son entrevue laisse entrevoir des issues. Il estinsulté par Lacaze. J’interviens. Lacaze s’en va avec les délégués qui veulent démissionner.
Dîner rapide (omelette) avec Collin D.. et Vialatte au Lincoln.
21 h45 nouvelle réunion : les délégués ont vu JP. Pas de licenciements automatiques.

14 juin 1968

Avec Gilbert à Fontenay aux Roses pour y prendre Garry et ses affaires: sacs, manuscits etc…De là, chaussée d’Antin où il dépose son sac. Puis rue Custine: manuscrit dans l’appartement, le reste à la cave. Déjeuner là. L’Odéon, devant lequel nous sommes passés, a été vidé par la police. Le reflux toujours.
Hemming me demande de brûler ses manuscrits , s’il… »Je ne suis jamais arrivé de le faire ».
Chez Hélène. Gatti me propose de mener un groupe de débat autour de son film, en été, lorsqu’il sera tourné à la Sorbonne ou Nanterre.
18 h 30 cantine. R. Cartier explique sa nomination, sa fidélité inconditionnelle à JP. Question : la société des journalistes (pas hostile). Thérond ? il doit servir sous lui « L’ombre de Mahomet ».
19 h 15 Thérond applaudi. Lit les lettres de JP et les siennes, demande qu’on ne laisse pas les « calomnies et mensonges » continuer. Sollicite en somme un hara-kiri de la rédaction.
Monique Valls, déléguée, déclare qu’une motion sera affichée lundi par laquelle des signataires protestent contre l’éviction de Thérond – Lacaze (due à leur part dans la Sté des journalistes) et demanderont leurs indemnités. Grand trouble dans l’assemblée. Cas de conscience – faux, mais habile. Dîner au R.V des chauffeurs avenue Wagram. Rencontré un clochard qui fut valet de pied et maître d’hôtel chez les grands de ce monde. ( Buchenwald ensuite!)

15 juin 1968

Cdf de Hanoteau, Menant, Rapinat : tous d’accord contre la « motion ».
Libération de Salan – et des autres.
A la Route à 6h avec ABBE.
Des oisillons dans le nid du rosier. Dîné dehors. Temps plein de douceur.

16 juin 1968

Pluie toute la journée.
Cueillette des cerises à Ozoir.
Une provocation policière aboutit à l’évacuation de la Sorbonne.

17 juin 1968

PM : on vend le journal devant la porte (les marchands en grève pour deux jours).
Calme aprés (et avant ) tempête. Pas de motion affichée. Un texte anodin dans le « Monde »
Hanoteau : « Je te parie que les gaullistes ne feront pas 200 sièges. La peur s’oublie vite. Les gens ne marcheront pas, ils ne raméneront pas des gens qui ont échoué »

18 juin 1968

Rencontré K. Kaupp rue des Canettes. PM toujours le point mort. Reçu un ami de Poggioli, Roger Rouvette, ancien journaliste à l’Huma, ancien anarchiste – qui a connu tous les gens du parti. Il a écrit un livre : « Les Enfants de Lénine » et voudrait le faire publier. L’ai envoyé au Seuil, après avoir prévenu Flamand.

19 juin 1968

Calme plat. Pluie d’été.
Déjeuner chez André with Bobol, Roche et Vincent de l’A.P.(qui revient, expulsé, de Chine – et plutôt révisionniste). Parlé de la révol de mai.
Vu Gaston bonheur, qui me demande de collaborer à « Campus », dictionnaire biographique en fascicules.
Vu au journal jacqueline Diwo. Parlé de tout.

20 juin 1968

Pluie.
H. Chandet pleure: on la met à la retraite. Elle se bat.
Cdf de Menant à 21h30. Désolé. Des têtes vont tomber à PM. Impossible de les sauver. De nouveau, la température monte.

21 juin 1968

Vu Kelber, accouru de Bonn. On lui annonce que le bureau est supprimé ! Il ne pourra plus payer les factures de la clinique où sa femme est traitée depuis des années. Tout le journal retentit d’imprécations contre le capitaliste JP…
Chateauneu n’a pas reçu sa part de revente. Chargelégue me dit que Lacaze l’a fait sauter.
Kelber encore: Arnold de Contades lui assure que son cas sera reconsidéré. H. Chandet a vu Cartier – qui ne veut rien faire (et elle le « comprend »!)

23 juin 1968

Pluie. élections.
Retour de la Route après 6h.Dans la côte de Cueilly, pluie: quelqu’un freine, trois voitures se télescopent, et moi en 4éme. Tout l’avant enfoncé. Mais le moteur marche.
Pas arrivé à temps pour voter (je n’y tenais d’ailleurs pas).
Premiers résultats :un raz-de-marée gaulliste. Le chantage à la guerre civile, les mensonges ont été efficaces. Impression personnelle : aucune surprise et aucune émotion. Comme si cela ne me concernait pas.

24 juin 1968

PM : visite d’Alberto Negri, étudiant de Milan qui travaille au Piccolo teatro. Il veut écrire sur K.G. une thèse et une pièce. Me propose de collaborer avec moi.
Cdf à 22 h 30 de Chargelègue : le listes de licenciement, mises à la retraites publiées. Réunion au cours de laquelle Lacaze excité monte les gens, dit Chargelégue. Demande faite aux chefs de service (Croizard, Charge…) de démissionner en signe de protestation.

25 juin 1968

Mis à la porte : Durieux, M.-H. Camus, Collin, Taousson, Azoulay, Mme Tendrew, Izis, (+ 2 illisibles). Requin, le sténo est en train de devenir fou, me dit Rapinat. Les événements fermentent et font fermenter.
Cdf.A de Lazareff à propos du portrait de Nocolas Obolensky à ma disposition.
Atmosphère lugubre et plaisante à la fois. Négociations.
Réunion 8h. Exposé. Communiqué de JP : report à 2 mois des licenciements. Thérond – Lacaze, pas question d’aller discuter. Grève ? On en discutera demain.
Bagarre dans le couloir entre Ménager et Monge (qu’on accuse d’avoir participé à l’élaboration des listes et de continuer à travailler).

26 juin 1968

Décidé ,à cause des cdf d’hier et de la nécessité de « souffrir » pour parler de KG, de ne plus fumer….à partir de demain, par exemple.
Requin est devenu fou, me dit Rapinat. Bourgeas a une dépression nerveuse.
Déjeûner chez le Chinois Custine avec M.H. Camus, Rapinat et Litran.
5 h 30 : réunion à la cantine. Motion de grève (en octobre) proposée au vote. On vote dans un climat de sentimentalisme facile etc… Résultats : 88 pour, 68 contre, 4 nuls.

27 juin 1968

Nul effet : calme plat à PM. JP aurait dit : « J’ai 68 amis, je croyais n’en avoir que 2 » et annoncé qu’il avancerait ses vacances.
« Songe d’une nuit d’été »
Cirque de Montmartre. Pluie
Lettre de Boulez (de Hollande) : « L’imagination n’a PAS pris le pouvoir ! »

28 juin 1968

Journée lourde, torride.
Journal: plusieurs papiers.
Cartier, d’après Chargelègue assure que « Joffroy a un sacré talent ! ».
On fête, dans la salle de la bibliothèque, le départ à la retraite de Mme Curatet et du caissier Bonard. La pauvre Curatet pleure quand je la félicite en lui disant combien on l’aimait ici.

30 juin 1968

Lu « Ma vie » de Trotski, en écoutant les résultats du 2e tour : c’était parfait.

Juillet 1968

Vacances.

5 juillet 1968

Lecture de Rosa Luxembourg. A parler ici, à Montpellier ou même à La Seyne, je constate que les gens n’ont pas compris, n’ont rien compris à Mai.
Travailloté dans la soirée.

7 juillet 1968

Invité avec B. à prendre le café chez JP au « Grand Chêne ». Elisabeth est là. Ils vont partir en croisière. JP me propose tout de go de faire ses mémoires, d’en prendre la responsabilité à sa mort. Il a des notes. L’histoire d’un homme, d’une époque. Il pensait à Cartier ou à moi, mais il a besoin qu’on l’aiguillonne. Parlé de H. Mille – que JP regrette. Mais il va le rappeler, me dit il.

Travaillé à K.G.

4 août 1968

Rentré à Paris.

6 août 1968

R. Cartier, préoccupé de sa collaboration avec moi, me dit Chargelègue.

12 août 1968

Gare Montparnasse : il ne reste plus de l’ancienne gare que l’aile gauche : plus de façade.

13 août 1968

Vu Cartier dans son bureau. Un personnage réjoui, sinistre et totalement dépourvu d’entrailles.

16 août 1968

Préparé le travail (dernière partie de K.G.).

21 août 1968

Radio ce matin : Russes, allemands de l’Est, Bulgares, Hongrois occupent la Tchécoslovaquie. Le PCF proteste contre l’occupation soviétique de la Tchécoslovaquie. Nouveau.

23 août 1968

Castro : pour les Russes, ainsi que les Nord-Vietnamiens. Mao contre.

28 août 1968

Carte de Gatti. Il finit la 1ère pièce du « Petit manuel de la guérilla urbaine », dont le titre provisoire est « Ariane et son papa » (il est à Pianceretto).

29 août 1968

Cdf de Bichat au journal. Maufrais opéré il y a 2 jours – on cherche des donneurs. Téléphoné pour les donneurs (journal, de Caunes, etc.).
Conversation avec JR Tournoux sur Maquet (qui a reçu sa lettre de licenciement et qu’on essaie de sauver) – et le journal.

30 août 1968

Bichat. Un seul de PM, Daniel Corda, du service du courrier.

2 septembre 1968

Déjeuner avec Litran (retour de Californie) et Le Bolzer (retour d’Alger).
Arrivée définitive de la Mutter à Paris. Elle ne me quittera plus.

4 septembre 1968

Tournoux : Contades réfractaire à l’idée de sauver Maquet.

5 septembre 1968

Vu Contades, moins hostile que je ne le croyais. Pense que c’est surtout Cartier qui est contre – mais il part en Amérique le 15 octobre… que je lui laisse quelques jours et que je vois Prouvost.
Cdf Croizard; il a lu « Au dessous du volcan »; il est émerveillé et tient à me le dire. Il n’est jamais trop tard….

10 septembre 1968

Chez Lazareff avec JJ et son amie Jacqueline Portefaix. Lazareff est avec un peintre nommé Alain Lesell – gentil et inodore. De là dîner, rue des Canettes, puis un verre à la rhumerie martiniquaise.

17 septembre 1968

A Vincennes à 10 h pour y voir le général Fournier (service historique de l’armée – K.G.) et le commandant de Gouberville qui fera des recherches pour moi.

19 septembre 1968

Cdf de F. Verny : Où en suis-je ? Promis tout pour fin octobre.
Visite d’A Lazareff à PM.(pour son peintre). Cdf à Nicolas pour le tableau que je lui offre.
19h Royal Monceau: dans le hall, conversation avec Gerbant Riegner- du congrès Juif Mondial.( K.G.)

20 septembre 1968

Vu Desmaisons (qui prépare des conférences en octobre salle Pleyel).
JP à propos de Maquet : ne veut pas le reprendre : « Il ne fait rien de bon », mais accepte qu’il travaille avec Bonheur au « Dictionnaire » en train – dit encore qu’il est trés satisfait de Chateauneu, me rappelle son projet de livre. Vu ensuite Maquet qui sortait de l’American, un peu rouge : d’accord pour essayer, mais ne veut pas « passer sous le paillasson ». Rêve d’ailleurs, de se retirer en Dordogne et de reprendre le métier de professeur. Un type que je n’arrive pas à percer, à comprendre. Grunebaum, dans l’autobus 80 : Izis licencié, fait un procès au journal.
Marie Robinet sortie d’affaire

25 septembre 1968

Enterrement du Dr Delthil, père de Françoise Verny.(église Ste Odile)
4h visite à l’ex adjudant Garnier (Cherche Midi). Rien
Coup de fil à 9 h de Dabernat : il a reçu sa lettre de licenciement. Convaincu maintenant que c’est Cartier. Au fond, satisfait de s’en aller avec ses indemnités : « Il y aura une succession de crises avant la crise de succession. Songez-y ».

26 septembre 1968

Cdf de Dante : retour d’Italie. Lit sa production italienne demain soir chez Hélène.
2H, visite à Maufrais Bichat. Toujours assez piètre état. Un homme de 60 ans délire et appelle : « Je veux voir ma mère ».

27 septembre 1968

Cdf de F. Verny. Lui ai donné le numéro de Maquet pour son projet de livre.
Dans la série des pièces de Gatti, Ariane est devenue le personnage qu’elle est (ou sera) et son père, en prof d’histoire (qui, dit Gatti, n’a plus rien de moi). Je suis venu le prendre à la Bastille : chambre rénovée, placards et grande table centrale. Acheté victuailles puis en taxi chez Hélène. Dîné avec le mari, Hélène et quelques autres. Lecture des 4 pièces déjà écrites sur 6. Arrivés encore Pia et Sylvain, les figures habituelles, 11 en tout, plus le fils d’Hélène. Monloup resté à la Bastille à dormir. Quelques pièces à reprendre. Une excellente : la « Rose blanche » ; une autre, reportage : « La Journée d’une infirmière ». Rentré 2 h.
Stéphane a réussi le bachot mention.
D. a rencontré Cohn-Bendit à Francfort. C.B. était avec Marie-France Pisier, une actrice de cinéma. Arrêté depuis 2 ou 3 jours dans les bagarres. En Italie, « La Naissance » à la Fenice de Venise : « Un désastre », dit D., mise en scène réaliste (Monod), décors Monloup, réduits à l’inexistence.
G. : « Je crois que nous avons toujours 20 ans. Toi, tu ne vieillis pas ».

28 septembre 1968

Gatti m’a dit hier que « Franco » sera joué au TNP en février.

30 septembre 1968

Terminé la première mouture de K.G.

1er octobre 1968

Danielle a déménagé depuis juillet, m’a dit Toussaint. Par Monloup, j’ai l’adresse : 137, av. de Versailles.

3 octobre 1968

Rapinat : « Tu sais comment on appelle Thérond, directeur d’un hebdo de cuisine ? Roger Graillon ! »

4 octobre 1968

A Mexico, une consœur journaliste italienne, Oriana Fallaci s’est fait blesser par les flics et militaires mexicains pendant les manifestations (20 à 40 morts).

9 octobre 1968

A la TV, débat sur l’antisémitisme : beaucoup de banalités. Un seul se détache, Elie Wiesel. Tout ce que je pense.

10 octobre 1968

Rue de Téhéran, chez Maeght : vernissage Calder (mobiles, « flèches »). Ensuite, au buffet de la gare de Lyon : dîner en l’honneur de Calder. Au moins 150 personnes sous le décor 1900. Calder se lève à la fin : « Merci au chef de gare ». A la table, Gabriel Monnot, de la Maison de la culture de Bourges et sa femme, le peintre Rebeyrolle, gros buveur sympathique. Parlé de Mai.
Calder part demain pour N.Y. et Mexico : un stabile de 25 m à installer. Vu Jean Davidson qui a fait éditer à son compte son livre: « Le travail des autres » que j’avais révisé.

14 octobre 1968

Vu Bellour – qui prépare les œuvres complètes des Brontë. On en fera quelque chose dans Match (avec Litran)
Cdf de F. Verny: le n° de Maquet dont elle me dit: « il boit, ce garçon »
Cdf de Marie robinet, ma secrétaire éternellement absente. Elle attend un enfant. mais il ne faut en parler à personne.

17 octobre 1968

Le Figaro ne paraît pas aujourd’hui. Grève contre J.P.
Manifestation des lauréats noirs sur le podium des J.O. à Mexico : tête basse, le poing ganté de noir levé.

19 octobre 1968

Cdf de Gatti. La Route ? Pas disponible avant la semaine prochaine. Rappellera. La « Passion » change de titre et devient « Passion en violet, jaune et rouge » (menaces des autorités franquistes)

20 octobre 1968

A propos du mariage Onassis – Jacqueline Kennedy, Dubois : « C’est une poule ! »

25 octobre 1968

Quatre rédacteurs en chef adjoints nommés : Mauge, Chargelègue, Mazoyer, Lavigne. Béi suggère qu’on millésime désormais les promus.
La récompense de bons et loyaux services pendant la révolution

1er novembre 1968

Arrêt des bombardements américains au Nord Vietnam.

9 novembre 1968

A Chaussy-Villeneuve, où les Hanoteau reçoivent dans le « château Renaissance « (un complexe golf, tennis, etc. tenu par M. et Mme de Villefranche). Beaucoup de monde. Croizard et sa fille en rouge, Laville, O.Merlin, Margueritte. Retour à 7 h.

15 novembre 1968

Rencontré Menant en sortant du journal. Brusquement vieilli : cheveux très gris, front dégarni. Il me dit : « Je suis malade depuis les « événements »  : il y a avant et après ». J’ai senti qu’il disait vrai.

16 novembre 1968

Cdf de Dabernat: part en Asie pour 1 reportage. fait 1 procés au journal pour le 14é mois sur la reconnaissance du syndicat(SNJ) pour qu’il y ait un précédent. Bravo, lui dis je. aucun regret dit il. Il est bien reclassé. PM vu de l’extérieur n’a pas d’avenir, dit il. Ce n’est pas un journal « professionnel ».
Cdf de Dante. Lui offre La Route. Il n’en a plus besoin. Il commence les répétitions au TNP le 1er décembre. La maison de sa mère a été gravement touchée par les inondations du Piémont : le toit emporté… elle a lancé un S.S.: Dante a réuni 2 500 f pour lui envoyer.

21 novembre 1968

Journaux, radios, TV, bourrés d’informations sur la crise monétaire. L’or de De Gaulle file à l’étranger à une allure catastrophique.
L’éternel bon français patriote planque sa fortune.
Les Allemands maîtres du jeu : les ministres sont réunis à Bonn.

22 novembre 1968

Dévaluation annoncée. Le pourcentage pas encore connu. La Mutter bouleversée.
Les Allemands arrogants parce que les Français sont venus les prier de les aider.
fait téléphoner par Baby à Bobol pour une place, signalée par Josette Dauphin (secrétariat de rédaction)

25 novembre 1968

Cdf Gary. RV déjeuner demain.
Terminé K.G.

1er décembre 1968

Train pour Nancy avec Pierre Espagne (ethnologue de la sorcellerie), le mage de Marsal dont les deux enfants ont disparu. Taxi pour Château-Salins.

2 décembre 1968

Froid glaçant. En voiture à Marsal – ville autrefois, autrefois fortifiée et qui n’est plus ni ville, ni fortifiée. Admis chez le Swami tous les quatre. 2 heures de délire schizophrénique impulsé par Espagne.
Vers 3 h photos du Swami devant ses objets de culte. Retour à 5 h 30 pour photo de famille avec les enfants survivants.
L’homme et fou. Les deux disciples sont des débiles. La femme aussi.…
Dîner et parlotter hôtel de Metz avec les confrères. Auparavant, les policiers, captivés par Espagne, arrivés de Metz pour parler avec lui.
C’était aussi mon anniversaire 

8 décembre 1968

A la maison, dicté sans arrêt au magnétophone à cassette ( que j’offre à Ariane pour Noel) des chapitres de K.G.

12 décembre 1968

Surveillé papier Durieux. bon.
Visite de Gary venu prendre quelques papiers pour les réexpédier aux EU. Part pour Annecy demain 13 décembre (jour de son anniversaire). S’est fait plus ou moins vider du TNP où Gatti répète sa pièce.

17 décembre 1968

Cdf à 8h de l’oncle Henri: Sam est mort hier soir d’une congestion cérébrale (en 1944 il avait perdu sa femme et ses deux petits enfants tués à Auschwitz).
Lettre aux Maufrais (l’imposteur qui prétendait être leur petit-fils, un mythomane, d’après le juge du Mans).
Rencontré Jeff sur les Champs-Élysées. Repart en Suisse, reviendra en janvier.

18 décembre 1968

Cdf Dante à 14 h 30. « Franco » interdit. Charles de Gaulle a tranché sur l’intervention des Espagnols.

19 décembre 1968

Dans Paris presse et le Monde, interdiction de la pièce confirmée.

20 décembre 1968

Cdf à Hubert Monloup : rien de neuf. Le TNP siège pour discuter les mesures à prendre.
Lu Bierce: Histoires impossibles.
Vu J.P. Voulait 1 papier sur Weidmann et les chromosomes. L’ai convaincu de n’en rien faire. A téléphoné pour l’augmentation de Chateauneu.
Cdf de J.Michaud! a fini un scénario, a pris la commande d’un Tito. Demande conseils.

21 décembre 1968

13 h 41 : départ à Cap Kennedy de la fusée circumlunaire américaine avec 3 hommes à bord. Vu à la TV en direct.
Chez Dante, bd de la Bastille. Vu fin de l’altercation avec Sanchez (pour extrémisme de celui-ci). Vu ensuite Hubert, Chaussat, Klee, Chichin, Lancelot, etc. Offre de Malraux à Gatti : Donnez « La Naissance » au TNP – et faites monter « Franco » au TEP ! Certains sont contre (c’est « sauver » Malraux – et entrer dans le jeu). Dante y voit des avantages, et moi aussi. A d’autres, le suicide. Seule crainte : le débordement de gens comme Lebel qui occuperaient le TNP…
Dîner à 4 rue de Lyon avec Hubert et Lancelot. Pas parlé une seconde de la lune. Voyant un journal du soir, D. S’écrie : « Qui fonce vers la lune… les Russes se sont fait avoir !… » Il est comme moi : il espère, il attend que les Russes gagnent quand même le match.

22 décembre 1968

Corrections manuscrit. Les autres en l’air corrigeaient leur trajectoire. A la TV, images en direct assez nettes, du vaisseau cosmique.

23 décembre 1968

TV : images de la terre vue du vaisseau cosmique. Mais pas la lune. Pourquoi ?
Tout le monde parle de la lune.

24 décembre 1968

TV vers 13 h 30, la lune à 300 Km – peu commotionnant finalement.

27 décembre 1968

Cosmonautes arrivés à bon port, dans le Pacifique cet après-midi.
Dicté Rapinat.

29 décembre 1968

Report des corrections.
Au journal, dicté la fin du XVI à Rapinat.

30 décembre 1968

Les Israéliens ayant fait un raid sur Beyrouth à la suite d’un attentat contre un avion à Athènes – le Conseil de sécurité est réuni. Tout le monde condamne Israël, bien qu’il n’y ait pas eu de sang versé. A Athènes, un passager tué. Les Américains qui ont des intérêts dans les compagnies libanaises condamnent aussi. Et le pape envoie un message au Liban.